lundi 7 octobre 2019

Mon avis sur "La chaleur" de Victor Jestin

Victor Jestin est jeune. Il a vingt-cinq ans, est diplômé du Conservatoire européen d'écriture audiovisuelle et signe un étonnant premier roman, La Chaleur publié chez Flammarion. Et qui dit premier roman, dit sélection des 68 premières fois.

Oscar est mort parce que je l’ai regardé mourir, sans bouger. Il est mort étranglé par les cordes d’une balançoire. Ainsi commence ce court et intense roman qui nous raconte la dernière journée que passe Léonard, dix-sept ans, dans un camping des Landes écrasé de soleil. Cet acte irréparable, il ne se l’explique pas lui-même. Rester immobile, est-ce pareil que tuer ? Dans la panique, il enterre le corps sur la plage. Et c’est le lendemain, alors qu’il s’attend chaque instant à être découvert, qu’il rencontre une fille.

La Chaleur est l’histoire d’un adolescent, Léonard, étranger au monde qui l’entoure, un adolescent mal dans sa peau. Il ne sait pas jouer le jeu, celui de la séduction, de la fête, des vacances, et s’oppose, passivement mais de toutes ses forces, à cette injonction au bonheur que déversent les haut-parleurs du camping. La légèreté, Léonard ne connaît pas. D'ailleurs, il n'aime pas les vacances, la plage, le soleil et encore moins les jeunes de son âge, qu'ils soient de sexe féminin ou masculin. Il tue le temps comme il peut au camping. Léonard n'attend qu'une chose, que son calvaire prenne fin ce, d'autant plus depuis qu'il a traîné le corps d'Oscar et qu'il l'a enseveli sur la plage. Rien n'explique son geste surtout lorsque l'on sait que cet adolescent n'a fait que peu de bêtises en dix-sept ans. Léonard n'est pas un criminel. Il est plutôt du genre timide, mal dans sa peau. Heureusement, il ne reste plus qu'une journée de vacances avant de boucler les valises et d'oublier. Mais La chaleur assommante rend cette dernière journée interminable et insupportable.

La chaleur est un court roman puissant particulièrement angoissant. Il se lit d'une traite et quasiment en apnée tellement le suspense est fort. Et c'est là tout le talent de Victor Jestin. Tenir en haleine le lecteur, faire grossir cette boule qui prend le ventre, coupe le souffle. Au fil des pages, Léonard agace, énerve mais attendrit également tant ce jeune homme est mal dans sa peau et maladroit. Même si finalement il ne se passe pas grand chose, peu importe, l'essentiel est ailleurs. Il est dans l'ambiance oppressante qui monte crescendo et qui est servie par la plume de Victor Jestin. Bien que simple son écriture est particulièrement visuelle. Pas étonnant au vu de la formation de l'auteur. Impossible de ne pas imaginer les scènes, de ne pas entendre la musique. Il y a du Ozon, du Rohmer, du Hitchcock dans La chaleur. L'ambiance est si bien rendue que c'est poisseux et les viscères complètement nouées que l'on referme ce roman. Tout est là et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle La chaleur figure dans les sélections du prix Renaudot, du prix Médicis et du prix Femina. 

Sous un soleil de plomb, quelque part dans un camping des Landes, un auteur est né. Belle lecture !

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