mardi 19 novembre 2019

Mon avis sur "Cent millions d'années et un jour" de Jean-Baptiste Andréa

Découvert récemment avec son premier roman, Ma reine, Jean-Baptiste Andrea revient enchanter la rentrée littéraire avec un conte. Il nous propose de suivre une expédition paléontologique partie sur les traces hypothétiques du squelette d’un dragon perdu dans une montagne inaccessible. Les 68 premières fois ne pouvaient pas ne pas sélectionner Cent millions d'années et un jour publié aux Éditions l'Iconoclaste.

1954. C’est dans un village perdu entre la France et l’Italie que Stan, paléontologue en fin de carrière, convoque Umberto et Peter, deux autres scientifiques. Car Stan a un projet. Ou plutôt un rêve. De ceux, obsédants, qu’on ne peut ignorer. Il prend la forme, improbable, d’un squelette. Apatosaure ? Brontosaure ? Il ne sait pas vraiment. Mais le monstre dort forcément quelque part là-haut, dans la glace. S’il le découvre, ce sera enfin la gloire, il en est convaincu. Alors l’ascension commence. Mais le froid, l’altitude, la solitude, se resserrent comme un étau et entraînent l’équipée là où nul n’aurait pensé aller.

Cent millions d'années et un jour est le récit d'une quête insensée, de celle qui pousse un homme à vouloir réaliser coûte que coûte son rêve, de celle qui peut mener sur les sentiers de la gloire et de la reconnaissance éternelle, de celle qui nous fait toucher le divin du doigt. Avec son second roman, Jean-Baptiste Andrea nous embarque dans l'univers âpre d'un glacier franco-italien, de celui qui renvoie à sa propre solitude, celui qui impose une inévitable introspection. Dès lors, l'ascension ravive les souvenirs du paléontologue et c'est en écho que surgissent le premier trilobite, le chien bleu, le père violent appelé le Commandant, la mère malmenée par ce dernier mais adulée par son fils et toutes les humiliations. L'expédition se révèle alors comme un combat contre soi. Se prouver que l'on vaut le meilleur.

Cent millions d'années et un jour se ressent plus qu'il ne se décrit, c'est un huis clos tantôt doux et tendre comme un lever de soleil, d'autres fois dur et âpre comme un roc mais toujours cinglé par le vent, le froid, la rudesse des éléments, de quoi sombrer dans la folie. Toute la force de ce roman vertigineux réside dans le chemin que Jean-Baptiste Andrea nous fait parcourir. De sa plume cinématographique, poétique et sensible, il déplace les montagnes. Il nous transporte loin et haut, il transcende la lumière, nous recentre sur l'essentiel. 

Cent millions d'années et un jour est plus qu'un roman, c'est un conte. Quant à Jean-Baptiste Andrea, il est plus qu'un auteur, c'est un conteur. Écoutez-le ici, c'est poétique à souhait !

Belle lecture, beau voyage !

mardi 5 novembre 2019

Mon avis sur "Le détachement" de Jérémy Sebbane

Jérémy Sebbane est écrivain et scénariste. Il est l'auteur de deux romans Après quoi on court en voie d'adaptation au cinéma et plus récemment Le détachement. Il est également l'auteur d'un essai consacré à Pierre Mendès France, développe plusieurs films et une série politique. Il a été la plume de personnalités politiques comme Manuel Valls et Fleur Pellerin. Le détachement a été choisi dans la sélection de rentrée 2019 de 68 premières fois.

Depuis toujours, Juliette aime raconter des histoires. Maxime, son seul confident, l'écoute et fait semblant de la croire. Bienveillant, il sait qu'elle a souffert. Mais tout bascule entre les deux amis lorsque Maxime, à qui Juliette a narré durant des semaines une relation passionnée avec un dénommé Raphaël, découvre que ce dernier est mort le soir de sa rencontre avec la jeune fille. Juliette qui refuse de vivre dans le réel préfère croire que tout le monde se ligue contre elle pour nier son histoire d'amour avec Raphaël. Elle devient une veuve imaginaire, s'invente la vie qu'elle aurait pu avoir avec le défunt et va à la rencontre des proches du jeune homme qui n'ont jamais entendu parler d'elle. Fatigué des mensonges de son amie, Maxime se détache d'elle. Et si la solution était d'inventer un autre monde moins décevant que celui dans lequel ils évoluent ?

Le détachement est un roman à deux voix qui met en scène une amitié inconditionnelle entre deux jeunes gens. Elle, mythomane, va se révéler érotomane au gré des pages. Lui, une plume, va accéder à son rêve, devenir conseiller politique et être confronté à la violence de ce milieu sans pitié pour le non-énarque qu'il est. Elle se rêve en veuve éplorée d'un homme disparu qui ne l'a jamais connue, lui se rêve auteur d'un comédien qu'il admire secrètement, se rêve amant d'un jeune homme alors même qu'il n'assume pas son homosexualité. L'un comme l'autre trouve refuge dans leur bulle, leur imaginaire, plutôt que d'affronter la réalité. Tous deux sont immatures, en ont parfaitement conscience et se disent qu'ils grandiront plus tard.

Je ne vais pas vous mentir, d'abord j'y ai cru. Puis très vite mon mental m'a déconnectée de la réalité. J'étais passionnée par l'histoire que Jérémy Sebbane me racontait, j'étais attachée à Juliette et Maxime au point de ne faire qu'une comme eux. Impossible de lâcher ce livre. Très vite j'étais déjà ailleurs, dans le cabinet d'une psy, d'un ministre... et puis subitement j'ai grandi. C'est donc complètement détachée que j'ai tourné la dernière page. 

J'aurai aimé prolonger un peu la réalité, vous raconter des histoires... Bien que la plume de Jérémy Sebbane soit agréable, fluide, bien qu'il m'arrive parfois de tenter de rendre la vie plus jolie, bien que nous aurions pu nous aimer, je ne vais pas vous mentir, Le détachement ne m'a pas embarquée.

Belle lecture !

samedi 2 novembre 2019

Mon avis sur "Les jours de ton absence" de Rosie Walsh

Si Les jours de ton absence est le premier roman de Rosie Walsh, il est le quatrième de l'auteure. Et oui, auparavant elle publiait sous le pseudonyme de Lucy Robinson. Quels qu'aient été les motifs qui l'ont poussée à écrire sous un nom d'emprunt, Rosie Walsh n'a pas de craintes à avoir. Son premier roman est un véritable succès. Un best seller. Sa jolie couverture a sacrément circulé sur les réseaux sociaux. En cédant à la tentation, je n'avais qu'une crainte, être déçue et devoir écrire cette chronique sous un nom d'emprunt...

Sept jours d'idylle... Il aura suffi d'une semaine pour que s'inverse le cours de l'existence monotone de Sarah. Depuis qu'elle a rencontré Eddie, sur une petite route de campagne anglaise, la jeune femme est certaine qu'un bonheur sans nuages les attend. Sa vie débute enfin. Le jour où il lui annonce qu'il doit s'absenter pour un voyage prévu de longue date, Sarah n'a aucune inquiétude. Mais le temps passe et Eddie ne revient pas. La laisse sans nouvelles. Ne répond plus à ses messages. Rien. Alors que ses amis pensent qu'il n'est tout simplement pas intéressé, Sarah est persuadée qu'elle a manqué quelque chose. Que cache le silence d'Eddie ? Peu à peu, une explication se dessine. Mais Sarah est-elle prête à l'entendre ?

Défini comme une lecture d'été avec tous les préjugés qu'une telle expression peut recouvrir, Les jours de ton absence est un roman totalement addictif. Il l'est d'une part parce que l'intrigue est rondement bien menée, que les personnages sont attachants et d'autre part parce que l'auteure parvient parfaitement à nous manipuler. En effet, alors que l'on a la certitude d'avoir deviné ce qui est arrivé à Eddie et d'avoir compris ce qui l'a poussé à fuir,  au détour d'une page, l'auteure nous surprend et nous embarque dans une direction insoupçonnée. Dès lors, c'est conquis et encore plus attentionné que la lecture de ce roman se poursuit. Un véritable  page-turner. 

Loin d'être mièvre comme le laisse à penser l'utilisation du qualificatif "lecture d'été", Les jours de ton absence aborde des thèmes universels tels que l'amour, la famille, le deuil, le manque, la culpabilité mais également des thèmes d'actualité tels que le ghosting et la surveillance de la vie privée d'autrui via les réseaux sociaux. Par ailleurs s'il est vrai que Les jours de ton absence aurait pu verser dans le mélo, les clichés -même si je dois bien avouer il y en a quelques uns- il n'en demeure pas moins qu'il reste avant tout un roman d'intrigue bien ficelé. Quant à la plume de Rosie Walsh, elle est fluide, plaisante. Immersive elle nous révèle avec précision et justesse le mental des personnages.  

Quelle que soit la saison et puisque in fine il n'y en a pas pour s'adonner à la lecture, je vous recommande Les jours de ton absence pour sa délicate couverture colorée mais surtout pour son intrigue qui mêle suspense, drame et amour.

Belle lecture !