lundi 4 avril 2022

Mon avis sur "Le guerrier de porcelaine" de Mathias Malzieu

Mathias Malzieu entame sa carrière d’homme poétique en 1993 en fondant le groupe de rock Dionysos. Peu enclin à choisir entre sa vocation de chanteur et d’auteur, il développe depuis lors un univers sous forme de livres, de disques et de films. Le guerrier de porcelaine (Albin Michel) est son roman le plus intime. Il retrace une part d’enfance de son père.

En juin 1944, le père de Mathias, le petit Mainou, neuf ans, vient de perdre sa mère, morte en couches. On décide de l'envoyer, caché dans une charrette à foin, par-delà la ligne de démarcation, chez sa grand-mère qui a une ferme en Lorraine. Ce sont ces derniers mois de guerre, vus à hauteur d'enfant, que fait revivre Mathias Malzieu, mêlant sa voix à celle de son père. Mainou va rencontrer cette famille qu'il ne connaît pas encore, découvrir avec l'oncle Émile le pouvoir de l'imagination, trouver la force de faire son deuil et de survivre dans une France occupée.

Il aura fallu plus de six ans à Mathias Malzieu pour écrire Le Guerrier de porcelaine. Il était à l'hôpital pour recevoir une greffe de moelle osseuse lorsqu'il a demandé à son père de lui raconter en détail l'histoire de son enfance. Le temps du récit, la maladie s'arrêtait et Mathias Malzieu a découvert ce que son père, le petit Mainou, a vécu en juin 1944. 

Le guerrier de porcelaine raconte l'histoire d'un petit garçon devenu orphelin de mère qui, par temps de guerre et par-delà la ligne de démarcation, va découvrir une partie de sa famille qu'il ne connaît pas encore. Pour ne pas oublier, Mainou qui souffre d'angine de questions, va consigner sa nouvelle vie dans un petit carnet qu'il destine à sa maman. Il va raconter l'injonction d'oublier sa langue maternelle en présence des soldats, l'étourdissant silence, le temps passé à se cacher à la cave, mais également le pouvoir d'imagination de l'oncle Émile, les bondieuseries de la tante Louise, la tendre sévérité de la grand-mère, le plaisir d'échanger avec l'énigmatique Sylvia, l'amie d'enfance de sa maman, sans oublier l'improbable rencontre avec Marlène Dietrich le cigogneau et Jean Gabin le hérisson. 

Le guerrier de porcelaine est un roman intime bercé par l'humour, l'innocence et la candeur de l'enfance. Il déborde d'émotion et transpire d'amour, celui d'un fils pour son père. Mathias Malzieu a le don d'enchanter les périodes les plus sombres de l'histoire, d'insuffler tendresse et poésie tout au long de son récit. Une vraie délectation. Néanmoins, en refermant ce roman, la dure réalité nous rattrape et c'est aux enfants d'Ukraine que l'on pense. Ceux qui vivent sous terre pour échapper à la folie et la haine d'un homme. Je leur souhaite de tout cœur de croiser autant d'Émile que nécessaire pour que les étoiles de leurs yeux d'enfant ne s'éteignent jamais.

Belle lecture !