mercredi 31 juillet 2019

Mon avis sur "L'odeur de chlore" d'Irma Pelatan

Nous le savons, la mémoire olfactive est très puissante. Les odeurs déclenchent des émotions, nous rassurent ou nous consolent. Parfois elles nous renvoient directement dans le passé, à un moment, dans un endroit, à une émotion. L'odeur de chlore renvoie naturellement à la piscine. Mais pour Irma Pelatan ce n'est pas à n'importe quelle piscine que cette odeur la renvoie. Non, c'est à celle de Firminy, une ville située à proximité de Saint-Etienne. C'est le célèbre architecte Le Corbusier qui a imaginé cette piscine. Ce site inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO valait bien qu'on lui consacre un premier livre. Irma Pelatan s'est jetée à l'eau. 

L'odeur de chlore, c’est la réponse de l’usager au programme Modulor de l’architecte Le Corbusier. C’est la chronique d’un corps qui fait ses longueurs dans la piscine du Corbusier à Firminy. Le lieu est traité comme contrainte d’écriture qui, passage de bras après passage de bras, guide la remémoration. Dans ces allers-retours, propres à l’entraînement, soudain ce qui était vraiment à raconter revient : le souvenir enfoui offre brutalement son effarante profondeur.

Entre 4 et 18 ans, Irma Pelatan fréquente deux à trois soirs par semaine la piscine municipale de Firminy. La natation fonde en elle un certain rapport au corps et un certain rapport au rythme. Cette piscine est déjà un discours sur le corps. En effet, l'architecte du bonheur concevait ses réalisations comme des machines à habiter. Selon lui, le corps devait définir l'habitat. Alors comment vivre dans de tels espaces -qu'ils soient privés ou collectifs- lorsque son corps n'obéit pas aux standards définit par Le Corbusier ? Bien que celui d'Irma Pelatan ait changé durant ces quatorze années, bien qu'il ait évolué, ce corps n'a jamais semblé avoir été adapté au lieu, au projet de l'architecte. La piscine n’avait pas été conçue pour une petite fille, pas plus que pour une jeune femme. Tout tournait autour du corps, mais pas du sien. Tout tournait autour du corps d'un homme mesurant un mètre quatre-vingt trois. Sans cesse, elle sentait que quelque chose clochait. La sensation d’harmonie visée par le Modulor ne la concernait jamais. 

L'odeur de chlore c'est à la fois un texte qui interpelle sur la relation que l'on entretient avec son corps, du bouleversement que de sa transformation génère, des efforts physiques que l'on doit faire pour se l'approprier, pour le rendre supportable, mais c'est également une critique de la standardisation de ce corps, notamment lorsque cette dernière aboutit à la construction de lieux de vie. L'odeur de chlore n'est pas un roman, il s'apparente davantage à court recueil de souvenirs. Ceux de l'effort. L'effort de devoir se dépasser sportivement, l'effort de devoir accepter son corps changeant, l'effort de devoir s'adapter au lieu dans lequel on évolue. 

En dépit de sa plume fluide et limpide, Irma Pelatan m'a entraînée au fond de la piscine. J'ai bu la tasse. Dommage j'aurai préféré plonger dans L'odeur de chlore.

Belle lecture !

mardi 30 juillet 2019

Mon avis sur "Varsovie - Les Lilas" de Marianne Maury Kaufmann

Marianne Maury Kaufmann est illustratrice, peintre et auteure. Son dernier roman publié aux Éditions Héloïse d'Ormesson, Varsovie - Les Lilas aborde le thème de la solitude des personnes âgées et du pathos qu'elles traînent derrière elles et dont elles aimeraient bien se délester. Si seulement elles savaient comment s'y prendre...

Francine fuit. Chaque minute, chaque jour, chaque rencontre, chaque souvenir. Elle fuit. À bord du 96, bus dont elle connaît chaque recoin, chaque arrêt, chaque chauffeur. Elle fuit. Elle écoute et observe. Parler ? Dire ce qui lui brûle le palais ? Elle en crève d’envie mais elle a oublié, tout comme pleurer.
Lorsqu’elle croise Avril dans le 96, elle sait immédiatement qu’elle aussi tente d’échapper à sa vie…

Passer ses journées dans le bus plutôt que dans son petit appartement, être en mouvement pour ne pas cogiter, telle est la recette de Francine pour rompre sa solitude et éviter de ressasser son passé. Francine est du genre taiseux. Communiquer, elle ne sait pas, elle n'a jamais su. Depuis l'enfance Francine trimbale une lourde histoire familiale. Un père qu'elle n'a quasi pas connu, une mère avec laquelle elle partagera les camps de concentration. Son aplomb l'en sortira, mais en est-elle seulement sortie ? Puis Paris. Un mari, une fille, une petite-fille. Francine a toujours eut besoin d'être en mouvement. Depuis qu'elle est veuve et avec le poids des années, elle n'arpente plus la Capitale à pied, mais en bus. Le 96. Terminus Porte des Lilas. Cette ligne, Francine la connaît parfaitement. Tout comme les chauffeurs. Elle leur a même donné des surnoms. Observer les passagers et le temps qui s'écoule telle est la principale occupation de Francine. Des amis, elle n'en a pas. Elle voit bien un couple toutes les semaines, mais les visiter relève plus de la corvée que du plaisir. Francine est désespérément seule et ne fait aucun effort pour rompre cette solitude jusqu'à ce qu'elle rencontre une jeune fille, Avril. Grâce à cette dernière, Francine deviendra un peu moins invisible aux yeux des autres jusqu'à entretenir l'espoir que l'ambiance des Fêtes de fin d'année la gagne et qui sait qu'un chauffeur de bus ne la dépose devant chez sa fille pour le Réveillon.

Bien que la plume de Marianne Maury Kaufmann rende la lecture de Varsovie - Les Lilas agréable, voire à certains moments poétique, il m'a manqué un je ne sais quoi pour monter dans le 96 et accompagner Francine dans sa quête. Ses non-dits, ses secrets, ses silences assourdissants, sa solitude m'ont terriblement pesé, très certainement parce que les bus parisiens regorgent de Francine. Heureusement, ce voyage organisé par les 68 premières fois, se termine par une note d'optimisme et d'espoir. 

Dans le bus où ailleurs, belle lecture !

dimanche 28 juillet 2019

Mon avis sur "Des jours sans fin" de Sebastian Barry

Sebastian Barry est un écrivain irlandais d'exception, il suffit de plonger dans l'un de ses romans pour s'en rendre rapidement compte. Des jours sans fin, son  sixième roman traduit en français s'inspire tant de son histoire familiale que de celle de son pays. Une aventure humaine hors du commun.

Dans les années 1850, chassé de son pays d'origine par la Grande Famine, Thomas McNulty, un jeune émigré irlandais, part tenter sa chance en Amérique. Sur sa route, il rencontre le beau John Cole, qui devient l’ami et l’amour de sa vie. Livrés à la faim, au froid et à la peur, tour à tour, Thomas et John vont combattre les Indiens des grandes plaines de l’Ouest, se travestir en femmes pour monter des spectacles, et s’engager du côté de l’Union dans la guerre de Sécession. Jusqu’à ce que la violence de la guerre les rattrape… 
Sebastian Barry se plaît à dire qu'il a mis cinquante ans à écrire Des jours sans fin. Enfant, dans son Irlande natale il avait l'habitude de se glisser dans le lit de son grand-père pour se réchauffer. Ce dernier lui racontait alors l'histoire de son arrière-grand-oncle parti faire la guerre contre les Indiens. Fort de cette légende familiale, Sebastian Barry a lu des dizaines d'ouvrages sur le massacre des Indiens et la guerre de Sécession. Il s'est imprégné de tout ce qu'il pouvait, il s'est attaché à entendre la voix de Thomas McNulty, cette voix qui l'a guidée tout comme celle de son fils, Toby, sa muse à qui il dédie ce roman. Cinquante ans pour donner naissance non seulement à un personnage hors norme, mais à un roman qui traite de l'exil, de la nature des hommes et de l'identité sexuelle.

Sebastian Barry décrit avec âpreté la faim, le froid, les grands espaces, la dureté de la nature, les absurdités de la guerre, la haine, les viols, le sang versé, le massacre des Indiens, la chasse des bisons, les instincts primaires des hommes et puis au milieu de ce sombre tableau, à l'opposé il y a cette touche de couleur baignée d'instants de bonheur et de légèreté, le plaisir de la danse, la beauté du paysage et celle de l'amour entre deux hommes, la douceur des gestes, l'amitié, la volonté malgré tout de fonder une famille aussi atypique soit-elle. Il y a d'un côté la violence et de l'autre, pour toute réponse, la générosité et l'amour. 

La plume de Sebastian Barry est acérée, si bien que c'est sous tension que se lit Des jours sans fin. Heureusement l'humour de l'auteur qu'il parsème au détour d'une phrase, d'une page, permet de reprendre son souffle et de décompresser. Impossible de rester insensible à cette fresque puissante et intimiste à la fois. Le mieux est encore de lire Des jours sans fin pour s'en rendre compte.

Un grand merci aux éditions Folio pour ce moment intense de lecture.
Belle lecture !

vendredi 26 juillet 2019

Mon avis sur "Boys" de Pierre Théobald

Décidément, ils ont du talent ces garçons, surtout Pierre Théobald. Journaliste sportif, il a écrit deux livres sur le sport. Logique ! Cette année il a publié aux Éditions JC Lattès son premier livre de fiction, Boys. Un recueil de nouvelles découvert grâce aux 68 premières fois. Et bien pour une première fois, c'est pas mâle du tout...

Boys s'ouvre sur le refrain que les gens de ma génération ont fredonné dans les années 80, Boy's don't cry de The Cure. Et oui en ce temps là, les hommes ne pleuraient pas. Heureusement le regard sur les hommes a évolué. Ils sont sensibles les hommes d'aujourd'hui. Boys, ce sont des hommes de tous âges, saisis chacun à un instant de bascule. Un mari qui enquête sur la vie secrète de sa femme, un séducteur qui s’apprête à retrouver une fille dont il n’a que faire, un sportif sur le déclin… Des losers magnifiques, des romantiques déraisonnables. Des pères sans enfant, de grands enfants devenus pères. Et, au milieu de tous ces hommes, il y a Samuel, que l’on retrouve à différentes étapes de sa vie, et qui doit faire face au plus difficile des renoncements.

Boys c'est Antoine, Samuel, Steve, Cédric, Sacha, Gilles, Bastien, Greg, Théo, Fred, Marc, Abel, Alex, Léon, Nicolas et Karim. Ils sont jeunes, vieux, célibataires, mariés, séparés, amoureux, apeurés à l'idée de trébucher, pères ou en devenir, enfants, travailleurs, chômeurs, heureux, tristes, losers, malades mais tous ont en commun d'être terriblement touchants. Chacun d'eux évoque un fragment de vie sans fard, ni faux-semblants, fait d'instants de bonheur ou de souffrance, de doute ou de certitude. Ils se livrent ces hommes avec beaucoup de pudeur et de sensibilité. Ils sont tantôt doux, tantôt durs, mais toujours profondément humains. 

Pierre Théobald aborde avec délicatesse et subtilité le thème trop souvent occulté en littérature, la masculinité. Il l'aborde avec une infinie tendresse. Boys c'est une plongée dans le cœur et la tête des hommes. À travers différents portraits, différentes histoires qui se croisent, s'entrecroisent, se complètent, l'auteur évoque leurs désirs profonds, leurs craintes, leurs succès, leurs déceptions. En quelques pages, il fend la carapace de ces hommes, les met à nu. Il les rend beaux, touchants, terriblement touchants. Loin des clichés, ces hommes oscillent entre virilité et romantisme, force et faiblesse. 

De surcroît, la plume ciselée, juste et précise de Pierre Théobald rend cette radiographie des hommes infiniment émouvante. Parce qu'il n'y a pas d'hommes sans femmes, l'auteur dédicace son livre aux femmes. "Pour elles" écrit-il. C'est un joli cadeau qu'il nous fait, ils sont beaux ces hommes avec leur faille, leur sensibilité. En refermant Boys, on n'a qu'une envie, étreindre ces Messieurs et leur déclarer "Hommes, je vous aime !".

Boys est un recueil à lire, Boys ce sont des hommes à aimer et Pierre Théobald, un auteur à suivre.

Belle lecture !

mercredi 24 juillet 2019

Mon avis sur "Les déracinés" de Catherine Bardon

Il y a des premières fois particulièrement réussies, Les déracinés est de cette trempe là, vraiment ! Voici un premier roman à découvrir. Tout d'abord, il compte pas loin de huit cents pages (respect !) et surtout c'est une fresque qui vous embarquera de l'Autriche à la République dominicaine, en passant par la Suisse, les Etats-Unis, puis Israël. Ce premier roman est palpitant. Faut dire que son auteure, Catherine Bardon est une amoureuse de la République dominicaine. Elle y a vécu, a écrit des guides de voyage et un livre de photographies sur ce pays. Autrement dit, elle avait le décor, il ne lui manquait qu'une histoire à nous raconter...

Autriche, 1931. Lors d'une soirée où se réunissent artistes et intellectuels viennois, Wilhelm, jeune journaliste de 25 ans, a le coup de foudre pour Almah. Mais très vite la montée de l'antisémitisme vient assombrir leur histoire d'amour. Malgré un quotidien de plus en plus menaçant, le jeune couple attend 1939 pour se résoudre à l'exil. Un nouvel espoir avant la désillusion : ils seront arrêtés en Suisse. Consignés dans un camp de réfugiés, ils n'ont qu'un seul choix : faire partie des cent mille Juifs attendus en République dominicaine après l'accord passé par le dictateur local Trujillo avec les autorités américaines. Loin des richesses de l'Autriche, la jungle sauvage et brûlante devient le décor de leur nouvelle vie. Là, tout est à construire et les colons retroussent leurs manches. L'opportunité de se réinventer ? 

Les déracinés débute dans une Vienne moderne en pleine effervescence artistique et intellectuelle. Parmi les deux cent mille Juifs qui y vivent, un jeune journaliste va rencontrer une jeune femme étudiante en dentisterie. Tous deux apprécient l'art, la littérature. D'esprit frivole, ces amoureux transits croquent la vie à pleines dents jusqu'à ce que l’antisémitisme s'invite et que Vienne soit annexée. L'exil s'impose. S'ensuit un périple fait d'épreuves, d'abandons, de désillusions jusqu'à la découverte d'une terre nouvelle. Aride, brûlée par le soleil, il faudra à tous ces déracinés déployer efforts et travail acharné pour la dompter. Grâce à leur instinct de survie, la République dominicaine deviendra la terre d'accueil d’Almah, de Wilhelm et des leurs.  

Inspiré de faits réels, Catherine Bardon a choisi de mettre en lumière un pan de l'histoire de la Seconde guerre mondiale méconnu. Formidablement documenté et particulièrement romanesque, Les déracinés est une vaste fresque qui s'étire sur trois décennies. Ce roman mêle petite et grande histoire, saga familiale et historique. La plume de Catherine Bardon est fluide, son style narratif tantôt classique, tantôt journalistique donne un certain dynamisme à la lecture de cette épopée. 

Les déracinés est un premier roman indéniablement réussi. Puissant et émouvant, je ne peux que vous en recommander sa lecture. Il vous transportera. Pour ma part, je remercie vivement la plateforme NetGalley et les Éditions Les Escales pour cette belle découverte et surtout de me permettre de lire la suite. Et oui, figurez-vous que Catherine Bardon a écrit une suite. Après Les déracinés, place à L'Américaine. Allez zou, je file, j'ai lecture !

Belle lecture !

jeudi 18 juillet 2019

Mon avis sur "Une folie passagère" de Nicolas Robin

En cette période estivale à l'heure où d'aucuns s'apprêtent à explorer des contrées lointaines, Nicolas Robin nous convie à bord du vol à destination du nuage numéro huit. Ce vol fera escale à Vancouver et tout le voyage durant, Bérengère veillera sur vous. Allez, au diable votre empreinte carbone, saisissez Une folie passagère et embarquez !

Bérengère s’évertue à être une parfaite hôtesse de l’air. Elle a quarante ans, vingt ans de métier, douze mille heures de vols au compteur, une robe turquoise sans faux plis et un impeccable chignon banane. Elle fait du ciel le plus bel endroit de la terre car, ici-bas, on l’abandonne : ni mari ni enfants, quelques amants de passage sans considération pour elle. Alors, elle cache ses blessures sous son uniforme et rien ne semble pouvoir altérer son désir de maîtrise et de perfection. Jusqu’au jour où une série de contretemps vient dérégler cette mécanique bien huilée. Elle embarque alors pour une destination imprévue, sur un vol riche en surprises, qui ne sera pas de tout repos, et, poussée à bout, en vient à commettre l'irréparable. Et si c'était dans la perte de contrôle que l'on trouvait le bonheur ?

Nicolas Robin qui, rappelons-le est steward, relate dans son troisième roman les aléas d'une vie de navigant avec une plume alerte et pleine de fantaisie. Dans le ton des comédies loufoques qui mêlent humour, émotion et férocité, Une folie passagère brosse un portrait de femme de notre temps, une femme de caractère prise dans l'étau d'un métier de service, en butte au jeunisme et au sexisme et qui n'aspire qu'à envoyer promener les conventions sociales pour trouver sa liberté. 

Une folie passagère est une comédie burlesque dans l'esprit des années 1970. Ce roman est léger et frais comme une brise d'été agrémenté de quelques pointes de sarcasme, pour notre plus grand bonheur. Quant à la plume de Nicolas, elle est toujours aussi fluide, vive, toute en émotion. Ses personnages sont profondément humains, attachants, vrais. J'ai particulièrement été touchée du lien qui unissait Bérengère à sa mamie Orly. Elle m'a fait penser à Poupette, la grand-mère qu'incarnait Denise Grey dans La Boum !

Aucun doute, Une folie passagère est un feel good book, à la fois léger, virevoltant et aérien. C'est un incontournable de l'été !

Belle lecture !


Nicolas Robin lors du Rock'n Books du 9 mars-19

lundi 15 juillet 2019

Mon avis sur "Les petits garçons" de Théodore Bourdeau

Si vous êtes adepte de l'émission Quotidien diffusée sur TMC son nom ne vous sera certainement pas inconnu. Théodore Bourdeau en est le producteur éditorial. Les petits garçons est son premier roman publié aux Éditions Stock. Je l'ai découvert dans le cadre de ma participation aux 68 premières fois. Écrire, a priori Théodore Bourdeau il sait puisqu'il est journaliste. Mais écrire un roman est une toute autre histoire, surtout lorsque comme lui, on pense que la littérature est quelque chose de sacré.

Les petits garçons, c’est l’histoire de deux amis qui traversent ensemble l’enfance, puis l’adolescence, et qui atterrissent à l’âge adulte le cœur entaillé. C’est l’histoire d’un jeune homme maladroit, le narrateur, un peu trop tendre pour la brutalité du monde, mais prêt pour ses plaisirs. C’est l’histoire d’un parcours fulgurant, celui de son ami Grégoire, et des obstacles qui l’attendent. C’est aussi l’histoire d’une société affolée par les nouveaux visages de la violence. C’est enfin une histoire de pouvoir, de déboires et d’amour. Mais avant tout, c’est l’histoire de deux petits garçons. Le narrateur l'affirme, il est né heureux, et après tout s'est compliqué.

Les petits garçons raconte l'enfance, l'adolescence puis l'entrée dans la vie d'adulte de deux amis, le narrateur et Grégoire. Deux parcours de vie qui se croisent, s'éloignent et se recroisent.  Deux garçons radicalement opposés, deux parcours faits de choix différents, deux évolutions aux antipodes. Et pourtant, leur amitié résiste aux épreuves, au temps. L'un est sensible et fragile, ne fait jamais les bons choix, l'autre est brillant à l'avenir prometteur, il réussit tout, réussit vite. Si l'un fascine l'autre, assurément les deux sont liés par une amitié sincère et profonde.

Les petits garçons est un roman d'apprentissage empreint de romantisme et de nostalgie. Sans jamais dater ni vraiment situer l'histoire, Théodore Bourdeau nous embarque de la douceur de l'enfance à la violence de notre société sur fond de crise, de confusion des sentiments, doublé de l'angoisse des attentats. Au final, Les petits garçons est une jolie histoire d'amitié. Bien que l'écriture soit fluide et somme toute agréable, il m'a tout de même manqué l'essentiel, l'émotion. A l'instar de Théodore Bourdeau qui donne l'impression d'avoir écrit ce roman avec un pas de côté, je l'ai lu de côté. J'aurais tellement aimé pouvoir sauter à pieds joints dans cette histoire et être éclaboussée de cette amitié, un peu comme quand enfant on saute dans une flaque d'eau. L'auteur a préféré que nous contournions cette flaque, dommage !

Belle lecture !

dimanche 14 juillet 2019

Rock'n Books, Save The Date !

Parce que lire c'est Rock !
Parce que vous avez aimé la première édition, puis la deuxième, dans huit mois jour pour jour, vous allez adorer la troisième !
En effet, The Fab's Blog a l'immense plaisir de vous annoncer que la troisième édition du Rock’n Books se tiendra le Samedi 14 mars 2020 !
Oui je sais cela peut vous sembler encore loin, mais sachez que j'y travaille déjà. Si quelques auteurs (et pas des moindres) ont d'ores et déjà confirmé leur présence, sachez que cet été je vais en sélectionner d'autres parmi ceux qui feront la rentrée littéraire 2019.


Le concept ?
Un café littéraire où l'on parlera littérature, où l'on échangera autour des livres et de l'émotion que les mots, les histoires procurent et où les dédicaces pleuvront...
Mais pas que...
Et justement, c'est ça qui est Rock !
Après l'échange, Let's Dance !
Le café littéraire sera suivi d'un concert Rock.

Et côté Rock, ce sera The Harvest Blues Band qui nous fera vibrer sur les riffs Rock and Soul... 

Alors, si vous aimez lire, si vous aimez le Rock, un conseil, retenez la date parce que si les deux précédentes éditions étaient bien, là je vous promets, que ce sera encore mieux !
D'ici là, je vous souhaite un bel été et surtout de très belles lectures !

dimanche 7 juillet 2019

Mon avis sur "Le jour de ma mort" de Jacques Expert

Jacques Expert a été grand reporter. Spécialiste des faits divers durant des années pour France Inter et France Info, il a couvert l'affaire Grégory et a eut l'occasion de rencontrer des tueurs en série tels que Michel Fourniret dont il dit être impressionné par la personnalité. Au-delà des crimes, c'est la psychologie des criminels qui l'intéresse. Et justement c'est de cela dont il est question dans son dernier thriller, Le jour de ma mort.

Charlotte est une jolie jeune femme sans histoire. Elle a un travail qui lui plaît, un petit ami avec qui elle s’apprête à se marier, un chat. Elle se dit heureuse. Cependant, cette nuit d’un dimanche d’octobre, elle se réveille en sueur, tremblante de peur, à l’affut du moindre bruit. Elle est seule chez elle, il est minuit passé. On est le 28 octobre. Le jour de sa mort. 
Trois ans plus tôt à Marrakech, Charlotte et trois copines sont allées consulter un voyant. Toutes les prédictions faites à ses amies se sont avérées exactes. Qu'en sera-t-il de Charlotte à qui il avait annoncé une mort violente le 28 octobre ?

Et vous que feriez-vous s'il ne vous restait que vingt-quatre à vivre ? À l'instar de Charlotte, resteriez-vous cloîtré chez vous à traquer le moindre bruit, le moindre indice pour déjouer les prédictions d'alors ? 
Vous l'aurez compris, Le jour de ma mort est un huis clos. C'est enfermée avec son chat dans son appartement de Boulogne-Billancourt que Charlotte va tenter de passer ce 28 octobre. Le temps s'écoule lentement. Au fur et à mesure que les heures s'égrènent, tout devient suspect, sujet à angoisse. L’héroïne cède à une véritable paranoïa. L'irrationnel la gouverne et la pousse à commettre des erreurs. Saura-t-elle résister à la pression ?

Pour faire monter le suspens et rendre la lecture suffocante, Jacques Expert alterne les récits. Celui de Charlotte, puis celui du tueur en série. Les chapitres sont volontairement courts. L'ambiance est pesante. La perte de contrôle et la naïveté de l’héroïne agacent. Le tout n'est pas sans rappeler les films d'Hitchcock. Véritable thriller psychologique, tout l'enjeu du roman Le jour de ma mort réside dans ce suspens qui monte crescendo. On irait même jusqu'à y entendre cette musique qui rend le tout insoutenable. L'écriture de Jacques Expert est simple mais énergique. La fin est plutôt surprenante. Pour autant et bien que la lecture de Le jour de ma mort reste agréable, le meilleur de Jacques Expert n'est certainement pas entre ces pages. 

Un grand merci à Babelio et aux éditions Sonatine pour ce thriller et belle lecture !

vendredi 5 juillet 2019

Mon avis sur "Une évidence" d'Agnès Martin-Lugand

Agnès Martin-Lugand est de celles qui savent raconter des histoires, de celles qui dès les premières pages embarquent le lecteur. Depuis son très touchant Les gens heureux lisent et boivent du café, elle est portée par le public. Comment expliquer un tel succès ? Et d’ailleurs est-il vraiment nécessaire de l'expliquer ? Il est là, tout simplement. Une évidence est le septième roman d'Agnès Martin-Lugand, un septième succès à n'en pas douter.

Reine vit à Rouen. Elle partage son temps entre son fils de dix-sept ans, Noé, et son métier qui la passionne dans une agence de communication. Reine mène une vie somme toute ordinaire jusqu'au jour où son patron et ami, Paul, lui demande de s'occuper d'un nouveau client au fort potentiel. Reine ne se doute pas qu'en se rendant à Saint-Malo, son passé va la rattraper et faire vaciller son bonheur bâti sur un mensonge.

Une fois de plus, Agnès Martin-Lugand parvient à capter toute notre attention dès les premières lignes. Rien de surprenant, elle nous parle de nous. De nos envies, de nos craintes, de cette difficulté à concilier nos vies multiples. Reine est une femme comme tant d'autres. Fragile et forte à la fois. Elle élève seule son fiston. Sa progéniture et son travail sont ses seules sources d'épanouissement jusqu'à ce que son équilibre bascule. Évidemment il est aussi question des rapports homme / femme, de cette difficulté que les uns et les autres ont à se laisser aller, à s'aimer. Et puis au gré des pages, la vraie héroïne de Une évidence nous est révélée. Elle se cache derrière des remparts. Dressée face à la Manche, coincée par la rive droite de l'estuaire de la Rance. Elle est belle, mystérieuse. Elle abrite Pacôme et Nicolas, Ces messieurs de Saint-Malo.

Si Agnès Martin-Lugand vit aujourd'hui à Rouen, elle a passé son enfance à Saint-Malo. Une évidence est l'occasion de rendre un bel hommage à cette jolie ville portuaire chargée d'histoire et par là-même de rabibocher Bretagne et Normandie. Il ne restera plus qu'à réconcilier Reine avec son passé, celui-là même qui l'a poussée à bâtir sa vie sur un mensonge. C'est comme à l'accoutumée en jouant sur la fibre des émotions qu'Agnès Martin-Lugand nous amène à répondre à cette interrogation : Faut-il se délivrer de son passé pour écrire l’avenir ?

Une évidence est un subtil portrait de femme, de mère, profond et inspirant, une femme qui affronte les épreuves de la vie comme la Cité des corsaires brave le vent des marées et les embruns. Le septième roman d'Agnès Martin-Lugand est à lire et Saint-Malo à (re)découvrir. 

Belle lecture !