mercredi 4 septembre 2019

Mon avis sur "Sale gosse" de Mathieu Palain

Mathieu Palain a grandi en banlieue parisienne à Ris-Orangis. Il rêvait de devenir footballeur ou prof de sport. Il est devenu journaliste. Pour les besoins d'un reportage, il a intégré à Auxerre la Protection judiciaire de la jeunesse, communément nommée la PJJ. Accrédité pour un mois, il en a pris pour six. Loin d'être une punition, son immersion lui a permis de côtoyer au plus près éducateurs, jeunes délinquants et tous les professionnels de la PJJ. Disposant d'énormément de matière et d'enregistrements, ce qui devait être un papier d'une quinzaine de pages s'est transformé en roman. Un premier roman. Sale gosse. Il est disponible aux Éditions Iconoclaste, que je remercie au passage tout comme Babelio

Wilfried n’est pas né sous une bonne étoile. Retiré à sa mère à huit mois, il est recueilli par les services de la Protection judiciaire de la jeunesse et placé dans une famille aimante. Les années passent. Et malgré son enfance chaotique, Wilfried parvient à intégrer un club de football. Le garçon est doué, mais il reste fragile. Un jour, dans un accès de rage, il frappe un autre joueur ; il est exclu du club. Alors il retrouve le quartier où l’horizon ne dépasse pas les tours. Retour à la case départ. Il sombre peu à peu dans une délinquance qui le conduira de nouveau à fréquenter la PJJC’est là qu’il rencontre Nina, éducatrice. Pour elle, chaque jour est une course contre la montre ; il faut sortir ces ados de l’engrenage. Avec Wilfried, un lien particulier se noue.

Sale gosse est un roman percutant. Il faut dire que Mathieu Palain a grandi avec la PJJ. Non pas qu'il fut lui-même un sale gosse, mais son père était éducateur à la Protection judiciaire de la jeunesse. Bien qu'il était du genre taiseux et ne parlait que très peu de son travail, les noms des jeunes et des collègues résonnaient après le dîner. Plus tard, alors que Mathieu Palain était stagiaire à Libération, Polisse de Maïwenn est sorti en salle. Touché par ce film, l'auteur en a parlé avec un ami de son père, Salem, ancien éducateur, devenu directeur de la PJJ de l'Essonne. Salem trouvait ce film très en-deçà de la réalité. Du coup, Mathieu Palain a eu envie de voir à quoi elle ressemble, cette réalité. Il a vu. Il a vu aussi tous ces anciens collègues, ces sales gosses devenus des hommes qui sont venus accompagnés de leurs femme et enfants dire au revoir à Salem qui a été emporté d'un putain de cancer. C'est ainsi qu'est née l'envie d'intégrer une PJJ. Pour voir et témoigner.

Avec sa plume hyper-réaliste, Mathieu Palain parvient à nous plonger dans le quotidien de ces héros anonymes et raconte avec empathie une réalité urbaine, bouleversante d’humanité. Bien qu'il s'agisse d'un roman l'auteur a précisé avoir écrit Sale gosse à partir d'histoires vraies, les personnes existent, il les connait. Et c'est là toute la force de ce récit. Il est crédible. Crédible par ce qu'il dit de la misère sociale de certaines banlieues, par ce qu'il montre du peu de moyens dont dispose les services de la PJJ, par la mise en lumière de l'engagement voire le surinvestissement de ces hommes et ces femmes. Mathieu Palain ne prête pas à ses personnages un langage trop politiquement correct. Les mots claquent. Les vannes fusent. Les expressions sont crues. Le langage est familier, très familier. Sale gosse est un roman certes, mais un roman au réalisme saisissant qui témoigne de la difficile mission de la PJJ et du manque de repères d'une certaine jeunesse. L'avantage c'est qu'à la différence d'un reportage, l'auteur a toute latitude pour achever son roman sur une note d'espoir...

Un conseil, pour comprendre, lisez Sale gosse
Belle lecture !

Mathieu Palain (à droite) lors de la rencontre organisée par
Babelio dans les locaux des Éditions Iconoclaste le 3 sept-19.


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