Amélie Cordonnier est journaliste. Trancher est son premier roman. Il est paru aux Éditions Flammarion. Il traite d'un sujet grave, malheureusement toujours d'actualité, celui de la violence faite aux femmes dans l'intimité du couple.
Elle a toujours fait des listes. Petite, elle notait le nom de ses poupées, des copains à inviter, des poneys qu'elle voulait monter, les mots inconnus à chercher dans le dictionnaire et tous les cadeaux d'anniversaire dont rêvait Anna. Elle griffonnait aussi le titre des Bibliothèque Verte à commander, puis la liste des romans à lire en priorité, celle des garçons qui lui souriaient à la sortie du lycée, ceux rencontrés le samedi en boîte de nuit. Quand les enfants sont nés, d'autres listes se sont ajoutées. Celles des corvées et des réjouissances à venir. Les horaires des biberons, ceux de la danse, des spectacles et expos à ne pas manquer : toutes ces listes-là, elle les a faites. Souvent avec plaisir, parfois en grognant, mais toujours de son plein gré. Des listes d'insultes, en revanche, ça jamais elle n'en avait fait. Cela faisait des années qu’elle croyait Aurélien guéri de sa violence, des années que ses paroles lancées comme des couteaux n’avaient plus déchiré leur quotidien. Mais un matin de septembre, devant leurs enfants ahuris, il a rechuté : il l’a de nouveau insultée. Malgré lui, plaide-t-il. Pourra-t-elle encore supporter tout ça ? Elle va avoir quarante ans le 3 janvier. Elle se promet d’avoir décidé pour son anniversaire.
Trancher explore les effets dévastateurs de la violence verbale, celle qui ne laisse de trace qu'à l'intérieur. Avec une grande subtilité, Amélie Cordonnier déroule la mécanique de ce qui conduit à l'extrême, à la destruction d'un couple, d'une famille. Elle amorce ces bombes que sont les mots d'un homme pour sa femme. Des mots qui claquent, détonnent, explosent. Des mots qui lacèrent de l'intérieur. Ces mots qui sont perçus comme autant de maux. Des mots qui pousseront la narratrice à devoir Trancher, partir ou rester.
Trancher est un roman puissant. Toute sa force tient dans sa construction. De sa plume alerte et imagée, Amélie Cordonnier a choisi de mettre en scène une femme, dont nous ne connaîtrons pas le prénom, qui parle d'elle à la deuxième personne du singulier. Cette forme narrative place le lecteur au cœur de cette cellule familiale dans ce qu'elle a de plus intime, de sorte que l'on reçoit cette violence psychologique en pleine figure, tel un uppercut. On suffoque, on a le souffle court. Au-delà des insultes, Amélie Cordonnier met en exergue l'ambivalence des sentiments, la difficulté à quitter celui que l'on aime, la difficulté à faire le deuil de son couple malgré le malheur subi et celui que l'on fait subir à ses enfants en ne choisissant pas. A l'instar de cette femme, on est déterminé à partir, à moins que l'on ne reste. Bref, il y a urgence à Trancher.
Alors partira ou restera ? La seule chose dont je suis certaine, c'est que la fin est magnifique. Un conseil, lisez Trancher d'Amélie Cordonnier, un premier roman percutant.
Belle lecture !
Elle a toujours fait des listes. Petite, elle notait le nom de ses poupées, des copains à inviter, des poneys qu'elle voulait monter, les mots inconnus à chercher dans le dictionnaire et tous les cadeaux d'anniversaire dont rêvait Anna. Elle griffonnait aussi le titre des Bibliothèque Verte à commander, puis la liste des romans à lire en priorité, celle des garçons qui lui souriaient à la sortie du lycée, ceux rencontrés le samedi en boîte de nuit. Quand les enfants sont nés, d'autres listes se sont ajoutées. Celles des corvées et des réjouissances à venir. Les horaires des biberons, ceux de la danse, des spectacles et expos à ne pas manquer : toutes ces listes-là, elle les a faites. Souvent avec plaisir, parfois en grognant, mais toujours de son plein gré. Des listes d'insultes, en revanche, ça jamais elle n'en avait fait. Cela faisait des années qu’elle croyait Aurélien guéri de sa violence, des années que ses paroles lancées comme des couteaux n’avaient plus déchiré leur quotidien. Mais un matin de septembre, devant leurs enfants ahuris, il a rechuté : il l’a de nouveau insultée. Malgré lui, plaide-t-il. Pourra-t-elle encore supporter tout ça ? Elle va avoir quarante ans le 3 janvier. Elle se promet d’avoir décidé pour son anniversaire.
Trancher explore les effets dévastateurs de la violence verbale, celle qui ne laisse de trace qu'à l'intérieur. Avec une grande subtilité, Amélie Cordonnier déroule la mécanique de ce qui conduit à l'extrême, à la destruction d'un couple, d'une famille. Elle amorce ces bombes que sont les mots d'un homme pour sa femme. Des mots qui claquent, détonnent, explosent. Des mots qui lacèrent de l'intérieur. Ces mots qui sont perçus comme autant de maux. Des mots qui pousseront la narratrice à devoir Trancher, partir ou rester.
Trancher est un roman puissant. Toute sa force tient dans sa construction. De sa plume alerte et imagée, Amélie Cordonnier a choisi de mettre en scène une femme, dont nous ne connaîtrons pas le prénom, qui parle d'elle à la deuxième personne du singulier. Cette forme narrative place le lecteur au cœur de cette cellule familiale dans ce qu'elle a de plus intime, de sorte que l'on reçoit cette violence psychologique en pleine figure, tel un uppercut. On suffoque, on a le souffle court. Au-delà des insultes, Amélie Cordonnier met en exergue l'ambivalence des sentiments, la difficulté à quitter celui que l'on aime, la difficulté à faire le deuil de son couple malgré le malheur subi et celui que l'on fait subir à ses enfants en ne choisissant pas. A l'instar de cette femme, on est déterminé à partir, à moins que l'on ne reste. Bref, il y a urgence à Trancher.
Alors partira ou restera ? La seule chose dont je suis certaine, c'est que la fin est magnifique. Un conseil, lisez Trancher d'Amélie Cordonnier, un premier roman percutant.
Belle lecture !
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