mardi 31 août 2021

Mon avis sur "Ultramarins" de Mariette Navarro

Dramaturge, Mariette Navarro intervient dans les écoles supérieures d’art dramatique tout en étant directrice de la collection Grands Fonds des éditions Cheyne. Bien qu'Ultramarins soit son premier roman, il n'est pas son premier manuscrit publié puisque Mariette Navarro a écrit des textes de prose poétique et des pièces de théâtre. Ultramarins est publié chez Quidam éditeur (que je remercie au passage). Il est le seul livre de cette rentrée littéraire que cet éditeur a sélectionné. Reconnaissable entre tous avec son habillage hypnotique réalisé avec soin par Hugues Vollant, Ultramarins est déjà sélectionné pour le Prix Brassens et le Prix roman Fnac. C'est bien connu, la qualité l'emporte toujours sur la quantité.

Ils commencent par là. Par la suspension. Ils mettent, pour la toute première fois, les deux pieds dans l’océan. Ils s'y glissent. A des milliers de kilomètres de toute plage.
A bord d’un cargo de marchandises qui traverse l’Atlantique, l'équipage décide un jour, d’un commun accord, de s’offrir une baignade en pleine mer, brèche clandestine dans le cours des choses. De cette baignade, à laquelle seule la commandante ne participe pas, naît un vertige qui contamine la suite du voyage. Le bateau n'est-il pas en train de prendre son indépendance ?

Ultramarins sacre l'irruption du mystère dans la routine et l'ivresse de la dérive. C'est un huis clos en plein océan qui plonge l'équipage d'un cargo dans les abîmes vertigineuses du doute après s'être offert une parenthèse iodée. Contre toute attente et en dépit de toutes les règles de procédure et de sécurité, la commandante de bord accorde un instant détente à ses hommes. Dès lors, tout va chavirer. Et s'il y avait un marin de plus sur le cargo, à moins que ce ne soit dernier qui se révolte, un peu comme s'il était à l'origine d'une sorte de mutinerie ? Une baignade et c'est toute la raison d'un équipage qui est engloutie par les profondeurs maritimes.

Ultramarins est un livre mutant. Il commence doucement comme tant d'autres mais à partir du moment où l'équipage rejoint le cargo après s'être baigné, ce livre mute. Mariette Navarro instille le doute, le mystère et son univers se révèle, s'impose. Ce roman devient à la fois onirique, hypnotique et poétique. Et c'est en cela que réside toute la force de ce roman sans oublier l'écriture sensuelle et l'imaginaire de l'auteure. Une entrave à une routine bien rodée et voici que l'environnement ultramarin d'un groupe prend une toute autre dimension. Et si ce vingt et unième personnage n'était qu'esprit ou tas de ferraille, voire un esprit enfermé dans de la ferraille ? 

Vous l'aurez compris, Ultramarins est un premier roman à l'image de sa couverture. Envoûtant. Il est à découvrir pour cette rentrée littéraire.

Belle lecture !

mercredi 11 août 2021

Mon avis sur "Les lendemains" de Mélissa Da Costa

J'ai découvert Mélissa Da Costa l'an dernier avec son premier roman Tout le bleu du ciel qui avait été sélectionné pour le Prix des Lecteurs 2020 du Livre de Poche, prix qu'elle a remporté d'ailleurs. Ayant été agréablement surprise, je n'ai pas hésité à glisser dans ma valise le format poche de son second roman, Les lendemains.

Réfugiée dans une maison isolée en Auvergne pour y vivre pleinement son chagrin, Amande ne pensait pas que l'on pouvait avoir si mal. Les jours se suivent et dehors le soleil brille, mais, recluse, elle refuse de le voir. Lorsqu’elle tombe par hasard sur les calendriers horticoles de l'ancienne propriétaire des lieux, elle décide pourtant, guidée par les annotations manuscrites de Madame Hugues, d’essayer de redonner vie au vieux jardin abandonné. Au fil des saisons, elle va puiser dans ce contact avec la terre la force de renaître et de s'ouvrir à des rencontres uniques. Jusqu’à ce que chaque lendemain redevienne, enfin, une promesse d'avenir.

Essai transformé pour Mélissa Da Costa. Cette auteure a un réel don pour faire vibrer avec justesse la sensibilité qui est nichée au plus profond de chacun d'entre nous, en nous épargnant de toute mièvrerie. Les lendemains est une histoire de deuil, de renaissance, de célébration de la nature et des éléments.

Comment survivre à un séisme qui, en une fraction de seconde, a tout emporté sur son passage ? Ce que vient de connaître Amande est d'une violence si intense que l'échelle de Richter ne saurait mesurer sa douleur. Dès lors et puisqu'elle est encore de ce monde, cette jeune femme qui a tout perdu a décidé de s'isoler et se pelotonner dans un sommeil chimique. Hiberner en plein été, hiberner en toutes saisons est la seule possibilité pour elle jusqu'à ce que le printemps revienne. Et c'est dans des calendriers annotés, dans les carnets d'une veille dame qui retranscrivait son quotidien, ses recettes et astuces de jardinage que peu à peu Amande va entrevoir le bout du tunnel. Se recentrer sur l'essentiel, ressusciter grâce à la nature, honorer la terre fertile et nourricière tels seront les chemins empruntés par cette courageuse héroïne.

Les lendemains est un roman qui non seulement touche à la transmission et la puissance de la nature, dans tout ce qu'elle a de sacré mais c'est surtout un roman qui transforme les larmes en collier de fleurs. Un conseil, glissez-le dans votre valise et lisez-le à l'ombre d'un amélanchier tout en écoutant les rouges-gorges pépier.

Belle lecture !

mardi 3 août 2021

Mon avis sur "Haute saison" d'Adèle Bréau

Avant d'être blogueuse, journaliste et directrice du site Internet TerraFemina, Adèle Bréau est pour moi l’auteure de la très sympathique trilogie La cour des grandes. Elle écrit sur ce qui fait ou ce qui a fait notre quotidien, les relations hommes - femmes, l'amitié (L’odeur de la colle en pot), les liens familiaux (Frangines) et maintenant les vacances, ça tombe bien c'est de saison, Haute saison même !

Anglet, fin juillet. À la réception du Club Océan, Germain accueille comme chaque semaine les nouveaux arrivants, avec un mélange de plaisir et d'appréhension...
Au milieu des habitués, certains clients goûtent pour la première fois aux « joies du club ». Chantal, qui débarque sans grand enthousiasme avec ses petits-enfants, Matthias, papa solo ayant cédé à l'appel de l'option « mini-club », et Fanny, venue en famille pour tenter de resserrer les liens, vont plonger dans ce huis clos aussi enjoué qu'inquiétant, dont la feuille de route est claire : faites connaissance et a-mu-sez-vous !

Ah le club, idéal pour les enfants, mais pour les parents, c'est une toute autre histoire. En fait, tout dépend de l'état d'esprit du moment. Il va falloir se coltiner les jeux apéro, les GO qui se prennent pour des athlètes le jour, des artistes la nuit, les GM qui se gavent à longueur de journée, qui parlent fort et qui squattent les transats dès potron-minet. Ah la joie du club ! 
Allez, avouez que vous aussi vous avez connu cette folle ambiance de Haute saison. Mais une fois acculturé, les masques tombés, les âmes mises à nue, on peut y faire de vraies rencontres. Dès lors, l'odieux papa solo qui abandonne ses marmots à la première mamie venue sous prétexte d'urgences professionnelles à traiter, cette jolie femme handicapée que vous n'osez regarder par crainte de finir en fauteuil roulant et tous ces Jean-Claude Dusse vont devenir des êtres vibrants d'humanité qui comme vous se débattent comme ils peuvent avec leur existence. Un réel échange va s'instaurer et bien qu'éphémère, le temps d'une semaine en Haute saison, des liens vont se tisser. 

Chantal, Fanny, Matthias, Germain, c'est un peu de moi, de vous, de nous et ce qui fait encore une fois, tout le charme de ce qu'Adèle Bréau nous raconte. Dès les premières pages, on plonge dans cette ambiance estivale, on convoque nos souvenirs et on s'identifie aux personnages, aux situations. Comme à l'accoutumée, et avec acuité l'auteure dépeint notre quotidien qu'il soit familial, amoureux ou professionnel, elle décortique avec humour et justesse nos petits travers qui nous bouffent la vie. Tout un chacun s'y retrouve et c'est justement ça qui est bon. Haute saison est un roman choral qui fait du bien, il sent le sable chaud, la crème solaire et nous apporte cette dose de légèreté qui nous a tant manqué ces derniers mois. 

Un petit passage en librairie s'impose avant de partir dans votre club préféré. Allez hop, on glisse Haute saison d'Adèle Bréau (publié chez JC Lattès) dans sa valise et on sourit à la vie !

Belle lecture !