vendredi 30 décembre 2016

Mon avis sur "Criminal Loft" d'Armelle Carbonel

Si à quelques heures du réveillon, vous vient l'idée de faire  le show, restez branché, j'ai ce qu'il vous faut : Criminal Loft  le dernier thriller d'Armelle Carbonel. Il vient de paraître en format poche aux Éditions Milady et il est très show...

Les règles du jeu sont simples. Enfermer huit criminels condamnés à mort dans le Sanatorium désaffecté de Waverly Hills et les filmer pour divertir les amateurs de télé-réalité avides de sensations et de voyeurisme. A la clé, la liberté, mais pour un seul d'entre eux uniquement. Les candidats, six hommes et deux femmes, sont tous particulièrement dangereux et déjantés. Ils  ne se connaissent pas et ne connaissent pas le passé criminel des autres participants. Pour mieux émoustiller les téléspectateurs, les participants sont filmés 24 heures sur 24, guidés par une voix off, surveillés par deux matons. Pour échapper à l'injection létale, ils doivent convaincre le public coûte que coûte qu'ils méritent de vivre et de rester dans le loft. Pour ce faire, ils n'hésiteront pas à mettre en place tous types de stratagèmes quitte à pousser les autres à la faute. Voilà pour le décor. Pour le reste, tout n'est que manipulation, machiavélisme, hémoglobine et suspense. Bienvenue au loft !

Bien que l'idée départ de Criminal Loft puisse sembler originale, elle m'a immédiatement renvoyée à L’œil de Caine, le premier roman de Patrick Bowen duquel j'ai eu beaucoup de mal à me détacher. Trop de ressemblances sur le fond et la volonté de la part de ces deux auteurs de dénoncer la télé-réalité, le voyeurisme et la manipulation. Outre cette similitude, j'ai trouvé que les personnalités des criminels étaient inégales. Autant celles de John et d'Aileen sont bien appréhendées, autant celles des autres criminels, notamment de Linda ou de Wallace manquent à mon sens de profondeur, si bien qu'ils perdent en crédibilité et on a du mal à les imaginer en odieux criminels pervers. Côté écriture, le style est fluide, rythmé, l'ambiance bien retranscrite. Pour autant, Criminal Loft n'est pas la bombe ou le chef d’œuvre annoncé par certains. C'est un bon thriller qui réunit tous les ingrédients permettant de passer un agréable moment, mais je suis restée sur ma faim. C'est donc sans regret que je quitte le loft.

Belle lecture !

vendredi 23 décembre 2016

Mon avis sur "La voix des vagues" de Jackie Copleton


Si à quelques heures de Noël il vous manque encore un cadeau, ne cherchez plus. La voix des vagues est celui qu'il vous faut. Pour un premier roman, Jackie Copleton nous offre un récit aussi délicat qu'une fleur de cerisier japonais et aussi percutant qu'une bombe atomique.

Voici quatre décennies qu'Amaterasu Takahashi s'est exilée aux États-Unis avec son mari après la disparition de sa fille et de son petit fils. Déracinée, vielle et seule depuis que son mari est décédé, elle reçoit la visite d'un homme horriblement défiguré. Il se présente comme étant Hideo, son petit-fils, le fils de sa fille unique, Yuko. Amaterasu est bouleversée. Elle aimerait tellement le croire. Mais Amaterasu sait que Yuko et son Hideo sont morts le 9 août 1945, le jour où les américains ont bombardé Nagasaki. Elle se souvient avoir fouillé sa ville en ruine à la recherche des siens pendant des semaines. Avec cette visite impromptue, Amaterasu se replonge dans un passé douloureux dominé par le chagrin, la perte et le remord. Elle se remémore tout ce qu'elle a voulu oublier : son pays, sa jeunesse et sa relation compliquée avec sa fille.

Dès les premières pages, Jackie Copleton nous immerge dans la culture japonaise, nous fait vivre cette tragique journée du 9 août 1945, le jour où les américains ont largué une bombe atomique sur  Nagasaki. L'auteure nous narre une tragédie historique et familiale sur quatre générations où se mêlent secrets, amours et trahisons. La voix des vagues c'est l'histoire des Takahashi. On oscille entre présent et passé pour découvrir le Japon d'avant et d'après guerre. Passant de la narration à la lecture du journal intime de Yuko et des lettres de Jomei Sato, l'auteure qui a un grand sens du romanesque, nous dévoile minutieusement et subtilement chaque personnage. 

Magnifiquement construit, servi par une écriture subtile et élégante La voix des vagues est un roman lumineux, un récit d'amour et d'Histoire. Il est d'une beauté bouleversante et d’une grande poésie. 

Un conseil, laissez-vous bercer au son des souvenirs d'Amaterasu, venez vous imprégner de la culture nipponne où tout n'est qu'émotion contenue. 

Belle lecture !

dimanche 18 décembre 2016

Mon avis sur "Le premier jour du reste de ma vie..." de Virginie Grimaldi

Cela n'aura échappé à personne, il fait froid, souvent gris, nous sommes crevés, rien d'étonnant c'est de saison... Et oui, bienvenue en hiver ! Alors si les oranges et le ginseng sont de circonstances, sachez que lire des livres dits d'été en hiver, produit le même effet. Ils  reboostent. Le premier jour du reste de ma vie de  Virginie Grimaldi est un roman vitaminé. Il nous projette en d'autres saisons, d'autres lieux. C'est un anti-grisaille garanti.

Marie a la quarantaine. Mère au foyer, elle est de celles qui ont préféré s'occuper de leur famille plutôt que de leur carrière. Mariée, elle a toujours fermé les yeux sur les écarts de conduite de son goujat de mari. Voici des années que Marie fait semblant. Quand l’anniversaire de son homme arrive, comme d'habitude elle invite la famille, les amis, prépare la pseudo fête. Mais cette année, Marie lui fait un sacré cadeau. Son départ. Elle s'est payé une croisière. Trois mois pour faire le tour du monde en solitaire. À bord, Marie rencontre deux femmes qui, elles aussi, sont à la croisée des chemins. Camille vingt-cinq ans, s'ennuie dans son job et enquille les aventures amoureuses. Anne la soixantaine, n'a connu qu'un homme dans sa vie et il vient de la quitter. Trois générations de femmes qui s'accordent une parenthèse pour réfléchir à leur avenir et reprendre leur quête du bonheur…

Le premier jour du reste de ma vie est le premier roman publié de Virginie Grimaldi. C'est un feel-good book, idéal pour l'hiver. Il se lit avec plaisir comme on déguste une bonne glace en bord de mer, il est aussi léger qu'une petite robe d'été. Les personnages sont touchants, drôles, ils se retrouvent dans des situations quelque peu cocasses, pas franchement réalistes, mais rien de dramatique. Le style est fluide, le ton résolument moderne. 

Le premier jour du reste de ma vie est idéal pour l'hiver. Il redonne le sourire et l'espoir, c'est déjà beaucoup !

Belle lecture !

vendredi 9 décembre 2016

Mon avis sur "De beaux jours à venir" de Megan Kruse

Megan Kruse, 34 ans, enseigne la littérature dans l'Oregon. De beaux jours à venir est son premier roman. Malgré son jeune âge, l'auteure a choisi un sujet grave. La maltraitance conjugale, un sujet malheureusement toujours d'actualité.

Depuis des années, Amy subit la violence de Gary. Jusqu’au jour où elle reçoit le coup de trop et décide de s’enfuir avec ses deux enfants, Jackson, dix-huit ans, et Lydia, treize ans. Premier arrêt au Starlight, motel crasseux qui va leur servir de refuge. Tous les trois s'endorment sereins et soulagés, mais au petit matin Jackson a disparu. Croyant gagner l’amour d’un père qui le rejette, il est retourné chez eux et a trahi sa mère et sa sœur en lui révélant l’adresse du motel. Amy se rend alors à l’évidence : si elle veut assurer sa sécurité et celle de Lydia, elle va devoir abandonner son fils. Cette séparation brise le cœur de la petite fille, très attachée à ce frère doux et différent. Jackson, de son côté, doit désormais se débrouiller seul, tiraillé entre la recherche désespérée de l’amour paternel, sa culpabilité et sa difficulté à gérer son homosexualité naissante.

De beaux jours à venir est un roman grave, d'une infinie justesse. Sans jamais nous faire sombrer dans  le pathos, l'auteure nous plonge dans un drame familial, celui d'une femme qui a tout quitté pour un homme qui se révèlera être un véritable tyran. Violence psychologique et physique sont présentes et palpables. Pour en finir et se libérer de l'emprise maritale, il est parfois nécessaire de faire des sacrifices. C'est son propre fils que cette mère sacrifiera. Ce fils qui a besoin de son père pour se construire, de se faire aimer de lui pour aimer à son tour. A travers le personnage de Jackson, Megan Kruse aborde avec délicatesse la question de l'identité sexuelle et plus particulièrement de l'homosexualité. Elle aborde cette quête avec beaucoup de subtilité et d'amour. De beaux jours à venir évoque également l'amour fraternel, ce lien si particulier et si fort qui unit les enfants entre eux. 

Servi par une belle plume, subtilement construit, alternant les narrations, mêlant présent et passé, De beaux jours à venir brosse le portrait intime d'une famille bancale, déterminée à s'en sortir et pour laquelle, on pressent au bout du compte, de beaux jours à venir. Les personnages sont attachants, notamment celui de Jackson, et guidés non pas par la haine, mais par l'amour. 

De beaux jours à venir est un roman à découvrir qui vous offrira de beaux jours de lecture !

 

vendredi 2 décembre 2016

Mon avis sur "Un paquebot dans les arbres" de Valentine Goby

Valentine Goby est l'auteure d'une œuvre abondante et plusieurs fois récompensée. Elle écrit aussi bien pour les adultes que les enfants et ne craint pas d’aborder des thématiques historiques fortes. Un paquebot dans les arbres est son douzième roman et nous conduit à la rencontre des derniers « tubards » pendant les Trente Glorieuses.

Au milieu des années 1950, Mathilde sort à peine de l’enfance quand la tuberculose envoie son père et, plus tard, sa mère au sanatorium d’Aincourt. Cafetiers de La Roche-Guyon, ils ont été le cœur battant de ce village des boucles de la Seine, à une cinquantaine de kilomètres de Paris. Doué pour le bonheur mais totalement imprévoyant, ce couple aimant est ruiné par les soins tandis que le placement des enfants en famille d'accueil fait voler en éclats la cellule familiale, l’entraînant dans la spirale de la dépossession. En ce début des Trente Glorieuses au nom parfois trompeur, la Sécurité sociale protège presque exclusivement les salariés, et la pénicilline ne fait pas de miracle pour ceux qui par insouciance, méconnaissance ou dénuement tardent à solliciter la médecine.  Petite mère courage, Mathilde lutte sans relâche pour réunir cette famille en détresse, préserver la dignité de ses parents retirés dans ce sanatorium, modèle architectural des années 1930, ce grand paquebot blanc niché au milieu des arbres.

Un paquebot dans les arbres est inspiré de l'histoire familiale d’Élise Bellion qui a fait découvrir à l'auteure le sanatorium d’Aincourt, situé à une cinquantaine de kilomètres de Paris dans le Val d'Oise. 
A travers l'histoire de Mathilde, jeune fille tout juste sortie de l'enfance, écrasée sous le poids des responsabilités, déterminée à égayer les week-ends de ses parents internés, à arracher son petit frère aux familles d’accueil, Valentine Goby nous plonge dans la France des Trente Glorieuses, de la Sécurité sociale et des antibiotiques, qui donnent à certains l’illusion de l’immortalité. Pour les autres, la maladie reste, comme l'a dit Jean-Paul Sartre "une exagération des rapports de classe". Les salariés bénéficiaient d’une protection et d’un accès aux soins, les autres faisaient comme ils pouvaient.  

Tubards, Paul et Odile ont, pour se soigner, puisé dans leurs économies, hypothéqué leur maison, abandonné malgré eux leurs enfants. Un combat contre le Bacille de Koch pour les parents, un combat pour rester digne malgré la faim, pour lutter contre l'éclatement de la cellule familiale pour leur cadette tout juste émancipée. La légèreté a laissé place à la gravité. 
"Elle reçoit sa première vraie paie, c'est une nouveauté aussi. ... elle vous énoncerait au centime près le montant de ses premières cotisations, merveilleux mot, co-ti-sa-tions, qui fait d'une visite chez le médecin un acte de routine, d'une grippe un état passager, il allège les souffrances physiques avant même leur apparition, dissipe l'effroi de la ruine."
Un paquebot dans les arbres est un roman grave et touchant. Son auteure nous épargne tout pathos, tout misérabilisme mais saisit avec force et beauté, la détermination d'une jeune femme décidée à résister, à aimer et à lutter. Un paquebot dans les arbres est une histoire d'attachement, de liens familiaux plus forts que tout. Une jolie découverte.

Belle lecture !