mardi 31 mai 2016

Mon avis sur "Le cœur du pélican" de Cécile Coulon

Elle n'a que 25 ans, a déjà publié cinq romans et un recueil de nouvelles, a reçu plusieurs prix et en plus elle est talentueuse. De quoi en faire pâlir plus d'un(e) !
Retenez bien son nom, elle s'appelle Cécile Coulon, elle est l'auteure  du roman Le cœur du pélican sélectionné par les Éditions Points dans le cadre du Prix du meilleur roman 2016. Cécile Coulon se consacre actuellement à la préparation d'une thèse "Sport et Littérature". Autant dire qu'en cette période de l'année, entre Roland Garros, l'Euro, puis le Tour de France, Le cœur du pélican, tombe à pic. Si les valeurs du sport ne sont plus à démontrer, Cécile Coulon a souhaité écrire un roman sur le sport tel que se le représentent les spectateurs. 


Anthime, un adolescent inséparable de sa sœur Helena, vient d’emménager dans une banlieue de province avec toute sa famille. Craignant de ne pas s’intégrer dans cette nouvelle communauté où personne ne l’attend, il va vite trouver le moyen de se distinguer et de se faire connaître. Lors d’une kermesse, il s’illustre par sa rapidité au jeu de quilles. Il n’en faudra pas plus à Brice, un entraîneur obèse qui flirte un peu trop avec l’alcool, pour l’enrôler dans la course à pied. Anthime, surnommé le pélican, excelle dans cette discipline. Il devient un exemple et un symbole pour toute une région. Alors qu'il n'était qu'à une foulée des jeux olympiques, son corps lâche dans le couloir n°4. Tous ses espoirs s'effondrent.
Vingt ans ont passé. Les muscles recouverts de graisse, les poumons encrassés par la nicotine, Anthime mène une vie étriquée auprès de sa femme, Joanna, et de leurs deux enfants. Il faudra qu'il assiste à l'enterrement de celui qui fut son entraîneur et qu'il se fasse chahuter par ses anciens camarades de classe pour que le pélican ressurgisse. Anthime va relever un défi, traverser le pays en courant. 

Cécile Coulon nous livre là un roman explosif sur la chute d'un jeune sportif devenu très vite, trop vite, une idole. Pareil au pélican, symbole de piété et de sacrifice, Anthime a couru, a gagné, a tout donné à son public. Parce que qu'il l'a déçu, parce que le rêve s'est brisé du jour au lendemain, Anthime s'est renié. Il a renoncé à sa vie, à son amour de jeunesse, la belle Béatrice. La gloire déchue, il versera dans la médiocrité jusqu'au jour où il ne pourra plus contenir sa frustration, ni la violence née de son amertume. Avec l'aide de celle qui l'a toujours soutenu, Helena, sa sœur, Anthime tentera de renaître et de dépasser ses limites. 
Le cœur du pélican est un roman qui nous raconte l'histoire d'un homme qui court après les promesses de la gloire, qui trébuche, reste à terre, pour finalement se relever et tenter de rattraper ses rêves ou peut-être tomber à nouveau... La plume de Cécile Coulon est intense, son style vif et dense est parfaitement maîtrisé, elle sait nous tenir en haleine, nous suffoquons d'avoir trop couru, de s'être trop contenu. 
En deux mots : Attention, talent !

Belle lecture ! 

samedi 28 mai 2016

Mon avis sur "Enfant, je me souviens..." un recueil collectif au service d'une belle cause

L’UNICEF France et Le Livre de Poche se sont associés pour permettre aux 124 millions d’enfants actuellement non scolarisés dans le monde de sortir de la pauvreté et de se construire de meilleures chances d’avenir. Agir en faveur de l'éducation des enfants, voici un projet généreux et ambitieux qui mérite toute votre attention. 

L'UNICEF France et Le Livre de Poche ont réuni pas moins de dix-sept grands noms de la littérature et de la culture francophones et leur ont demandé d'écrire sur le thème : Un souvenir de l'enfance. Résultat, dix-sept auteurs, dix-sept textes et un joli recueil, Enfant, je me souviens... 
Comme l'indique si bien Catherine Dolto en préface, les souvenirs sont indispensables parce que constitutifs de notre identité. Les expériences, les émotions, les évènements, les rencontres se déposent au plus intime de nous-mêmes pour former un humus affectif. Les anecdotes que nous appelons souvenirs d'enfance sont pour nous des repères. Ils constituent à la fois nos archives et nos annales. Parfois d'une grande banalité, ils n'en restent pas moins essentiels.  Ils donnent du sens à notre vie telle que nous voulons qu'elle soit ou que nous croyons qu'elle soit. Alors qu'ils soient vrais ou faux, quelle importance, tant qu'ils existent.

Enfant, je me souviens réunit Agnès Abécassis, Isabelle Autissier, Laurent Binet, Didier van Cauwelaert, Maxime Chattam, Matthieu Chedid, Philippe Claudel, Jacques Expert, Jean-Louis Fournier, Hélène Grémillon, Philippe Grimbert, Alain Mabanckou, Oxmo Puccino, Romain Puértolas, Tatiana de Rosnay, Eric-Emmanuel Schmitt et Sigolène Vinson. 
Ce recueil de nouvelles met en scène des souvenirs intimes ou fictifs. Il nous emporte dans des univers aussi différents les uns que les autres, dans des lieux divers et variés. De la Bretagne à la banlieue, en passant par la plage de Vieux-Boucau, au cœur de New-York ou encore de Louboulou, un petit village dans le sud du Congo-Brazzaville, nous voici voguant sur la mer, au cœur des problèmes d'intégration au sein des banlieues, à la rencontre de célébrités, à la célébration de coutumes, nous assistons à la naissance de vocations, à l'émerveillement d'un enfant devant la reconstitution fidèle de la bataille de Hoth dans un magasin de jouets, etc... Autant d'histoires rocambolesques variées alternant fiction, humour ou suspense.  
Pour apprécier ce recueil de nouvelles, il faut aimer les histoires courtes. La variété des auteurs et des styles est telle qu'il y en a pour tous les goûts. Enfant, je me souviens se lit en toutes circonstances, partout, dans les transports, la salle d'attente de votre médecin, en faisant la queue à la caisse ou à la station-service... Édité en format poche, il prend peu de place, compte 192 pages, coûte 5 € et pour chaque exemplaire vendu, 1,50 € est reversé à l’UNICEF. Alors pour faire une bonne action, se faire et/ou faire plaisir, on n'hésite plus, on achète ce recueil inédit de nouvelles.
Et je médite à celles et ceux, de par le monde, qui n'ont pas ce privilège.
Lire.
"La dernière lecture" - Maxime Chattam (p.57)
Belle lecture et tous mes remerciements au Livre de Poche pour leur confiance renouvelée !
 

dimanche 22 mai 2016

Mon avis sur "D'après une histoire vraie" de Delphine de Vigan

D'après une histoire vraie, le dernier roman de Delphine de Vigan, a été primé en 2015 par le prix Renaudot et par le Goncourt des lycéens. Est-ce seulement un roman ? Fiction ou autobiographie, telle est la question ? Pour encore mieux nous embrouiller, l'auteure cite Jules Renard, "Dès qu'une vérité dépasse cinq lignes, c'est du roman." La tonalité du livre est donnée.

Delphine est écrivain, quelques mois après la parution de son dernier roman à succès, elle a cessé d'écrire. Pendant presque trois années, elle n'a pas écrit une seule ligne. Pas une seule lettre administrative, pas un carton de remerciement, pas une carte postale, pas une liste de courses, pas un mail. Rien. La simple vue d'un bloc, d'un crayon, d'un clavier lui donnait mal au cœur. Dès qu'elle ouvrait un document word, elle restait immobile, des heures durant, les yeux rivés sur l'écran. Plus tard, ses mains se sont mises à trembler dès qu'elle les approchait du clavier. Elle a refusé toutes les propositions qui lui ont été adressées : articles, nouvelles de l'été, préfaces et autres participations à des ouvrages collectifs. Écrire, elle ne pouvait plus. Écrire, c'était non. La vérité c'est qu'au moment où Delphine s'apprêtait à se remettre à l'écriture, elle a rencontré une femme, L. (elle ?).

L. est rentrée dans la vie de Delphine et l'a bouleversée en profondeur, lentement, sûrement, insidieusement, dangereusement. Aujourd'hui Delphine sait que L. est la seule et unique raison de son impuissance, que les deux années où elles ont été liées ont failli la faire taire à jamais. Delphine de Vigan commence alors la narration de D'après une histoire vraie. Un vrai thriller psychologique. Delphine nous confie comment, fragilisée par l'épuisement de son dernier succès littéraire, la réception de lettres anonymes, le manque d'inspiration, elle est passée peu à peu sous l'emprise suffocante de L.

Magistralement construit et écrit, D'après une histoire vraie nous emporte littéralement dans l'univers de l'écrivain. L'angoisse de la page blanche, celle de ne pas savoir à quel genre d'écrivain appartenir, la peur de ne pas trouver de sujet, de ne pas être à la hauteur. Qu'écrire après un succès couronné par un prix ? Autant de questionnements qui font basculer dans la dépression. Et puis, cette question qui la taraude, la fiction est-elle réellement dépassée ? Le romanesque est-il terminé ? Est-ce que seuls les témoignages, les documentaires comptent parce qu'attendus par les gens au motif qu'ils croient ce qui est écrit. Enfin, le déclic. Et un sujet. Un vrai. Tellement vrai que l'on y croit. Mais où commence la vérité, où finit-elle ?
D'après une histoire vraie est un roman troublant qui brouille nos repères, les frontières entre fiction et réalité. Et si tout était vrai ? Et si tout était faux ? Et si j'avais été manipulée ? Ai-je seulement été à la hauteur ? Ai-je seulement compris ce que Delphine veut nous dire ? Autant vous prévenir, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait que pure et fortuite coïncidence. Euh, ou pas.... 
FIN*
Belle lecture !

lundi 16 mai 2016

Mon avis sur "Ciel d'acier" de Michel Moutot

Parce que certains évènements sont à jamais gravés dans nos mémoires, je suis certaine que si je vous demandais de me dire ce que vous faisiez le 11 septembre 2001, de suite vous sauriez me répondre. Michel Moutot, reporter à l'Agence France Presse a couvert les attentats du 11 septembre. Avec Ciel d'acier, son premier roman, il nous livre l'histoire fascinante des Indiens Mohawks, les bâtisseurs de l'Amérique, les ironworkers ou les skywalkers, ces ouvriers qui construisent les gratte-ciels et autres ponts et structures métalliques. Ces hommes ont été rendus visibles grâce à la célèbre photo "Lunch atop a Skycraper".

Déjeuner en haut d'un gratte-ciel - 1932

Ciel d'acier s'ouvre le 12 septembre 2001 par une narration très journalistique du déblaiement des Twin Towers écroulées. John LaLiberté dit Cat, a grandi bercé par l'histoire de l'édification des tours jumelles, la signature, la fierté d'une génération d'ironworkers. Tout comme ses ancêtres Mohawks, Cat est skywalker. Il travaillait sur un chantier à NYC lorsque les tours se sont effondrées. Sous le choc, Cat se rend spontanément à Ground Zero, propose son aide aux sauveteurs. Afin de rendre accessible les décombres, il est chargé avec quelques autres de couper les poutres métalliques qui forment au lendemain de cet innommable attentat un gigantesque mikado d'acier. 
"Dedans" c'est dur, épuisant, effrayant, dangereux, mais nous nous sentons plus qu'utiles : indispensables, admirés, investis d'une mission patriotique, sacrée, presque divine !. "Dehors", une fois passée la joie de retrouver les siens, la vie ordinaire semble fade, mièvre, médiocre, sans importance. "Ils ne savent pas, ne peuvent pas comprendre. Il faut avoir vu." (p. 224)

Nous voici propulsés au cœur de ce New York meurtri, blanchi par les cendres, à la recherche d'éventuels survivants. Nous suffoquons avec ces hommes dont l'air est devenu irrespirable, nos semelles fondent de marcher sur ces ruines brûlantes, nous sommes embarqués dans un univers apocalyptique. Mais au-delà de ce drame particulièrement bien narré et extrêmement documenté, nous voici embarqués à la découverte de l'univers de ces bâtisseurs que sont les Mohawks dont la (fausse) légende veut qu'ils ne connaissent pas le vertige. Plus d'un siècle avec ces indiens. D’un chapitre à l’autre, on va et vient tout au long de cette dynastie de constructeurs. L'industrialisation, l'apparition de l'automobile et l'augmentation du trafic vont modifier les déplacements. De nouvelles voies sont à ouvrir pour relier les grands lacs canadiens et américains à la côte atlantique. La construction de nouveaux ponts s'impose. D'abord en bois, puis en acier. Des ponts aux gratte-ciels, les Mohawks ont su se rendre indispensables grâce à leur expertise. Il ont su s'intégrer et évoluer tout en préservant leur culture. De père en fils, de génération en génération ce savoir-faire se perpétue. Les personnages, aux destins étalés sur plus d'un siècle, prennent vie à travers Jack LaLiberté, mort en construisant les tours jumelles, son fils Cat, qui les verra s'écrouler,  tout comme Manish Rochelle, le riveteur a vu le pont du Québec s'effondrer en 1907 et les siens périr.

Avec Ciel d'acier Michel Moutot nous raconte la passion de ces Mohawks qui ont participé à la construction de l'Amérique. Son roman fourmille de détails techniques et historiques. Information et fiction, rigueur et romanesque se marient à merveille.  
Ciel d'acier est tout simplement vertigineux ! C'est une fresque épique à découvrir de toute urgence qui a toute sa place dans la sélection Prix du meilleur roman des Éditions Points

Un vrai plaisir de lecture !

mercredi 11 mai 2016

Mon avis sur "Academy street" de Mary Costello

Academy Street fait partie de la sélection Prix du roman 2016 des Éditions Points. C'est le premier roman de Mary Costello, roman couronné par l’Irish Book of the Year Award 2014. Cent quatre-vingt-neuf pages consacrées à la vie de Tess qui nous mène de l’Irlande rurale des années 1940 à New York après le 11 septembre.

Tess Lohan n'a que sept ans lorsque sa mère meurt de la tuberculose. Avec elle, non seulement la radio s'éteint mais également le son de sa propre voix. Tess se réfugie dans le silence et s'enferme dans la solitude. Nous sommes en Irlande dans les années 40, dans le vaste domaine familial d’Easterfield.  Tess grandit dans l'indifférence de son père et de tous les siens sauf de Clara, sa sœur aînée. Mais le rêve américain, New York, va la priver de son seul repère. Tess se retrouve alors vraiment seule. Elle a vingt ans lorsque des études d’infirmière la mènent à Dublin. Son diplôme obtenu, Tess rejoindra sa sœur à New York. La vaste métropole et le tourbillon des années 60 emporteront la timide jeune femme vers son destin. Un destin d'une femme solitaire qui n'aura rien d'exceptionnel. Une femme qui subit la vie, qui s'interdit de la croquer. Une femme qui vit sa vie par procuration à travers les personnages des livres qu'elle dévore. Tess ne connaîtra jamais l'amour. Elle se donnera à un homme une seule et unique nuit. Quelques heures sans plaisir suffiront pour que Tess devienne mère. Une mère isolée qui élèvera son fils, Théo. Une femme et une mère condamnée à rester seule dans son appartement d'Academy street. Heureusement, Willa, sa généreuse voisine noire, lui apportera de précieux instants de bonheur.

Mary Costello nous propose le portrait d’une anti-héroïne. Une femme désespérément seule, trop effacée, une femme craintive, paralysée par la peur de l'abandon que la vie n'épargnera pas. Tess est ce genre de femme que l'on voudrait secouer, que l'on voudrait voir réagir, mais l'écriture et le style de l'auteure font que nous nous résignons et acceptons le sort de Tess.  Peu à peu Mary Costello nous révèle son héroïne telle qu'elle est, à savoir une femme d'une sensibilité étouffée, secrète, une femme somme toute banale mais qui possède une beauté intérieure touchante. Academy Street balaie plus d’un demi-siècle de la vie d'une femme sans importance que la plume délicate de son auteure magnifie et rend romanesque. Comme quoi les anti-héros sont de vrais personnages de roman. Un premier livre à découvrir et une auteure à suivre...

Belle lecture !

dimanche 8 mai 2016

Mon avis sur "Passent les heures" de Justin Gakuto Go

Dans la série, Prix du meilleur roman 2016 organisé par les Éditions Points, je poursuis mon périple lecture avec Passent les heures, le premier roman de Justin Gakuto Go, un jeune auteur né à Los Angeles d'une mère américaine et d'un père japonais. Il a vécu à Londres, Paris, Tokyo, New York et Berlin, villes qu'il connaît bien.

Tristan vient de terminer ses études et d'obtenir son diplôme à San Francisco lorsqu'il reçoit une lettre par coursier. En palpant l'enveloppe il sait que le papier est beau et le courrier important. Il provient d'un Cabinet d’avocats londonien qu'il doit impérativement contacter. Tristan apprend qu'il pourrait être l’héritier de l’immense fortune d’Ashley Walsingham, alpiniste disparu en 1924 en tentant de conquérir l'Everest. Pour toucher le gros lot, Tristan n’a que sept semaines pour prouver qu'il est bien son descendant, à défaut l'héritage reviendra à L’État. Repoussant son entrée dans la vie active, Tristan se rendra à Londres et tentera de relever le challenge. Débute alors une course contre la montre semée de fausses pistes, à travers toute l’Europe, sur les traces d’Ashley et de l’amour de sa vie, Imogen. Tristan va reconstituer le puzzle de son histoire grâce à la correspondance que les amants ont entretenu. Des tranchées de Picardie au Berlin des années vingt, des sommets de l'Himalaya aux fjords d'Islande, il découvre peu à peu leur fulgurante passion, prise dans les tourments de la première guerre mondiale. Obsédé par les amants tragiques, Tristan parcourt l'Europe et prend conscience du véritable enjeu de cette quête...

Alternant les chapitres Justin Gakuto Go nous fait vivre à la fois le périple de Tristan et l'histoire d'Ashley et d'Imogen. Il nous embarque à la conquête des sommets, nous traîne dans les tranchées, nous raconte les conditions de vie des soldats durant la première guerre mondiale, l'honneur d'une famille sali par la benjamine, les choix à faire, l'éloignement pour cacher ce qui était alors l’innommable. Passent les heures alterne habilement passé et présent pour tendre vers une même quête. Dès le départ, l'auteur sait éveiller notre curiosité, on se laisse facilement embarqué et nous tournons les pages avec plaisir. Mais malheureusement les longueurs du récit essoufflent le lecteur. Le rythme ralentit. Dommage, c'était bien parti...

Bonne lecture !

dimanche 1 mai 2016

Mon avis sur "Désolée, je suis attendue" d'Agnès Martin-Lugand

Désolée, je suis attendue est le quatrième roman d'Agnès Martin-Lugand. Doit-on encore présenter cette auteure ? Le best-seller Les gens heureux lisent et boivent du café, actuellement en cours d'adaptation au cinéma, c'est elle. Avant d'écrire, Agnès Martin-Lugand a exercé six années en tant de psychologue clinicienne dans la protection de l’enfance. Autrement dit, la psychologie elle connaît et nous le prouve encore une fois à travers sa nouvelle héroïne, Yaël.

Yaël est jeune étudiante en école de commerce, elle termine son stage au sein d'une agence internationale d'interprétariat. Ses études terminées, elle envisage de prendre le temps de voyager. Mais voilà que le dernier jour de son stage, le boss de l'agence, Bertrand, qui ne lui avait quasi jamais adressé la parole, lui propose de l'embaucher. Surprise, Yaël accepte et décide de reporter son voyage à plus tard. Le soir, elle se rend au QG de sa petite bande d'amis, un café parisien qui ne paie pas de mine, pour fêter son entrée dans la vie active. Yaël ne le sait pas encore, mais ce sera la dernière fois qu'elle verra Marc, son ami d'enfance. Les années ont passé. Dix exactement. Yaël a endossé le costume de la working girl, est devenue le bras droit de son boss et par la même occasion, un bourreau de travail. Elle ne vit que pour sa réussite professionnelle. En dehors de ses responsabilités, c'est le néant. Yaël n'a plus de temps à consacrer à ses amis et à sa famille. N'évoluant plus dans les mêmes sphères et n'ayant pas les mêmes préoccupations, elle s'est éloigné d'eux. Sa vie se résume à taxi, boulot et somnifères, jusqu'au jour où le passé resurgit pour fragiliser ses certitudes. 

Encore une fois Agnès Martin-Lugand a su nous embarquer dans l'univers de son héroïne qu'elle sait si bien rendre humaine et attachante malgré son addiction au travail et son manque d'empathie pour ses collègues. A travers l'histoire de Yaël, le passé de psychologue de l'auteure prend encore une fois le dessus. Elle dissèque les choix de son personnage, démonte un à un ses arguments pour la faire évoluer. 
Désolée, je suis attendue est résolument moderne, ce roman réveille cette dualité à laquelle les femmes (et les hommes) sont confrontés. Difficile de concilier travail, famille et temps libre. Difficile lorsque les responsabilités se conjuguent au féminin de ne pas se laisser engloutir par sa vie professionnelle et de trouver le juste équilibre.  Mais entre vie professionnelle et vie privée, faut-il vraiment choisir ? 
Au-delà de cette question, Agnès Martin-Lugand évoque cette culpabilité, cette pression que nous nous mettons toutes inconsciemment surtout lorsque le travail est synonyme de poste à responsabilités. Évidemment que ce n'est jamais facile, mais lorsque l'on prend conscience que cette volonté de toujours vouloir tout faire parfaitement nous pourrit la vie, on se rend compte que le lâcher prise a du bon... L'auteure nous propose des remises en question et nous interroge sur notre capacité à accueillir le bonheur sans avoir peur de se délester de poids.

Côté écriture, le style d'Agnès Martin-Lugand est toujours aussi fluide, d'une justesse tout en sensibilité et émotions. Un vrai moment de plaisir, un feel-good book que l'on a envie de partager et au détour d'une page nous retrouvons les personnages de son roman Entre mes mains le bonheur se faufile. Un joli clin d’œil.

Et si pour fêter le travail, vous preniez du temps rien que pour vous et que vous lisiez Désolée, je suis attendue ? Laissez-vous embarquer dans l'univers de Yaël et sa petite bande, vous ne le regretterez pas !

Bonne lecture !