mercredi 16 mars 2016

Mon avis sur "Quelqu'un pour qui trembler" de Gilles Legardinier

Gilles Legardinier est un de ces auteurs qui enquille les succès. Toujours bienveillant, drôle et sentimental, il est de ceux qui savent transmettre les émotions et ont un je ne sais quoi, qui fait du bien. Bien qu'en deçà de mes attentes, Quelqu'un pour qui trembler n'échappe à la règle. C'est un feel good book. 

Thomas médecin humanitaire a tout plaqué pour soigner ceux que l'on oublie trop souvent. Ses missions le conduisent en Afrique, puis en Inde où il vivra des années dans un village perdu. Son bonheur, se consacrer aux autres, jusqu’au jour où il apprend que la femme qu'il a autrefois quittée a eu une fille de lui. Ses certitudes vacillent. Il lui a donné la vie, mais il a moins fait pour elle que pour n'importe quel inconnu. Il décide alors de rentrer en France. Il trouve une place dans une maison de retraite dans le village où habite sa fille, Emma. Mais est-il possible d'être un père quand on arrive si tard ? Secrètement et à distance, Thomas va tenter de faire la connaissance de cette jeune fille de vingt ans. Il sera aidé par ceux que le destin placera sur sa route.

Quelqu'un pour qui trembler est un roman intergénérationnel qui m'a fait penser à ceux de Barbara Constantine. Pour autant, ce dernier Legardinier, bien qu'agréable à lire, n'a pas produit le même effet que ses précédents romans. Bien qu'attachants, sympathiques et parfois drôles, les personnages sont tous trop gentils. Du coup, trop de bienveillance et de bons sentiments nuit à la crédibilité de l'histoire. Heureusement, côté écriture, c'est toujours aussi fluide. Quant à la couverture du livre, marque de fabrique de l'auteur, je persiste et signe, elle est tout simplement horrible.

En résumé et bien que je n’irai pas jusqu'à soutenir que Quelqu'un pour qui trembler est raté, indéniablement, il est décevant.  Alors, Gilles Legardinier si vous ne voulez pas complètement vous cramer, il faut que tout change, sinon demain j'arrête !

Bonne lecture !

dimanche 6 mars 2016

Mon avis sur "Serre-moi fort" de Claire Favan

Lorsque la parution d'un nouveau roman d'un auteur que vous appréciez est annoncée et que de surcroît, à peine paru, les critiques sont déjà dithyrambiques, vous ne pouvez que céder à la tentation. Le problème c'est que vous y mettez tellement d'espérance que vous risquez d'être déçu(e).
Bien que j'apprécie les polars de Claire Favan, je dois bien avouer que Serre-moi fort, n'a pas été à la hauteur de mes espérances. Il a été annoncé comme étant son roman le plus abouti. J'y ai surtout vu dans la première partie, une redite de Miettes de sang, son avant-dernier roman. Heureusement, cette impression s'est par la suite, dissipée.

Serre-moi fort sonne comme un appel au secours désespéré.
Du jeune Nick, d'abord. Marqué par la disparition inexpliquée de sa sœur, il est contraint de vivre dans un foyer brisé par l'incertitude et l'absence. Obsédés par leur quête de vérité, ses parents sont sur les traces de l'Origamiste, un tueur en série qui sévit depuis des années en toute impunité.
Du lieutenant Adam Gibson, ensuite. Chargé de diriger l'enquête sur la découverte d'un effroyable charnier dans l'Alabama, il doit rendre leur identité à chacune des femmes assassinées pour espérer remonter la piste du tueur. Mais Adam prend le risque de trop, celui qui va inverser le sens de la traque. Commence alors, entre le policier et le meurtrier, un affrontement psychologique d'une rare violence...

Pour ne pas spoiler l'intrigue je m'en tiendrai au pitch officiel et m'attacherai plus à décortiquer "la recette Claire Favan" parce qu'il y a réel un savoir-faire de l'auteure. Outre tous les ingrédients que l'on trouve habituellement dans les polars (un serial killer, des cadavres, un flic qui n'a rien d'un super héros, un médecin légiste...) Claire Favan y rajoute une sacrée dose de psychologie. Je ne fais pas référence à la psychologie de comptoir, non je vous parle d'emprise psychologique, celle qui est violente, qui laisse des traces, celle qui manipule, qui dégouline, qui torture,  qui met le lecteur mal à l'aise. Je dois bien reconnaître que Claire Favan a un réel talent en la matière. Elle est machiavélique. La construction  de Serre-moi fort est scénarisée en conséquence. Trois parties qui ont chacune une fin mais qui sont diaboliquement liées. Elles s'emboîtent tel un puzzle. D'abord  frustré, le lecteur est déstabilisé pour mieux être surpris. 

Serre-moi fort débute avec Un peu. Nous sommes en août 1994, une jeune fille disparaît, la famille explose. Nick qui a toujours vécu dans l'ombre de sa sœur si parfaite, est la victime collatérale  de ce drame. (C'est cette première partie qui m'a étrangement rappelé Miettes de sang).
Serre-moi fort continue avec Beaucoup. Nous voici dix ans plus tard, en mai 2014. Adam Gibson est veuf. Il vient de perdre sa femme qui a été emportée par un troisième cancer après des années de maladies, de rémissions et de rechutes. Il a besoin d'occuper son esprit pour ne pas sombrer. Une macabre enquête va lui être confiée. Finalement, ce n'est pas dans le désespoir qu'il sombrera, mais dans beaucoup plus que cela...
Serre-moi fort se termine À la folie, nous sommes en novembre 2015 et assistons impuissants à un duel psychologique qui finira par nous mettre KO.

Un roman organisé en trois parties marquées par des scènes d'une puissance, d'une violence psychologique qui monte crescendo à en devenir insoutenable. Si le roman était adapté au cinéma certaines scènes deviendraient des scènes cultes. Je pense tout particulièrement à celle de la prison. Je n'en dis pas plus, mais ceux qui on lu Serre-moi fort ne pourront que partager mon point de vue. L'écriture de Claire Favan est fluide, parfaitement maîtrisée pour rendre l'ambiance noire et psychologiquement très pesante.
Au final, si vous ne connaissez pas les romans de Claire Favan,  que vous appréciez la littérature noire, vous ne pourrez qu'être emballé par Serre-moi fort. Et si comme moi, vous avez lu dernièrement Miettes de sang, un conseil, laissez passer un peu de temps avant de plonger dans la noirceur de ce dernier Favan.

Belle lecture !

jeudi 3 mars 2016

Mon avis sur "Scipion" de Pablo Casacuberta

Scipion de Pablo Casacuberta est l'une des sélections du Prix du Meilleur Roman 2016 des lecteurs des Éditions Points.
Né en 1969 en UruguayPablo Casacuberta est peintre, photographe, cinéaste et romancier. Auteur de cinq romans, il est célèbre dans toute l’Amérique latine. J'avoue que je ne le connaissais pas, mais après avoir lu Scipion, je comprends son succès. Pablo Casacuberta a une vraie qualité littéraire classique et il n'hésite pas à ponctuer son roman de multiples références classiques. Il oscille entre la tragédie et le comique, le tout parsemé d'un humour à l'anglo-saxonne.
 
Scipion c'est l'histoire d'Aníbal, pas du Hannibal de la bataille de Zama, d'Aníbal Brener, le fils du célèbre professeur Brener, illustre historien, grand spécialiste de l'Antiquité. Bien qu'il n’ait jamais été à la hauteur des attentes de son père, Aníbal a pourtant suivi ses traces en enseignant lui-même l’histoire. Un brin paranoïaque, il a été chassé de l’université, a sombré dans l’alcoolisme et la femme qu'il aimait est partie. A presque quarante ans, Aníbal vit dans une chambre en colocation avec un vieillard. Aníbal n'a de cesse de se morfondre sur son sort. Bref, un raté. Il faut dire qu'avec le prénom chargé de sens que son célèbre père lui a donné, cela n'a rien de surprenant. Pourtant, lorsqu'il reçoit deux ans après le décès de son père sa part du testament : trois boîtes à l’étrange contenu, une édition résumée de l'Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain, l'œuvre célèbre de l'historien britannique du XVIIIe siècle Edward Gibbon, et, entre les pages de l'ouvrage, les confidences de son père, Aníbal décide de se battre. Pour récupérer son héritage, il doit publier dans une maison d'édition reconnue, un essai historique d'au moins 500 pages, traitant d'un sujet contemporain. S'enchaînent alors des situations pittoresques, des rencontres improbables, ponctuées de réflexions quant à la filiation, l'admiration, l'influence, le rejet. Aníbal est très narcissique, son sport favori : l'introspection. Une sorte de génie autiste que l'eau va réveiller et révéler.
Au final, Scipion est un roman qui mérite d'être lu, bien que la lecture des 150 premières pages soit poussive, les plaintes et gémissements en tout genre de nature à plomber l'ambiance. Une fois ce cap passé et que l'on parvient à lâcher prise, le style de Pablo Casacuberta se révèle pleinement pour le plus grand plaisir du lecteur.

Belle lecture !